Les Zygènes du Maroc
Richesse et déclin
Catalogue systématique et inventaire taxinomique actualisés
Chorologie marocaine avec un état des lieux des populations
Plantes-hôtes – Phénologie – Bilan conservatoire
(Lepidoptera Zygaenidae Zygaeninae)
par Michel R. TARRIER
Reportages photographiques de Jean-Marie ANDRÉ
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Résumé
Après une trentaine d’années de voyages au Maroc, plus d’un million de kilomètres de routes et de pistes parcourues pour un total de plus de 4000 jours de terrain et la découverte de quelques 300 localités d’intérêt lépidoptérique, dont la plupart ont été suivies, l’auteur dresse un nouvel inventaire taxinomique des Zygènes de ce pays, avec l’indication des plantes-hôtes, des phénologies pour la plupart inédites, de la répartition actualisée de chaque espèce et des sous-espèces respectives, et conclut par le bilan conservatoire des habitats et des espèces.
Abstract
After thirty years of travel in Morocco, with more than a million of kilometers of roads and tracks covered for a total of over 4000 days of fieldwork and the discovery of some 300 places of lepidopterical interest, whom most were followed, the author draws up a new taxonomic inventory of the Zygaenids of this country, with the indication of the host-plants, phenologies for the most part unpublished, the updated distribution of each species and the respective subspecies, and concludes by the conservation assessment of habitats and species.
Présentation
L’intérêt tout particulier de l’Afrique Berbérique (Afrique du Nord, Maghreb), et du Maroc situé en son terme occidental, provient du fait que le Genre Zygaena y manifeste l’aboutissement de nombreuses de ses lignées phylétiques. Le centre de l’évolution phylogénique des Zygaenidae est situé dans le biome indochinois, mais de nos jours, le centre majeur d’évolution spécifique est plus occidental et se trouve en contrée méditerranéenne. Nombre de témoins offrant encore des caractères ancestraux perdurent néanmoins au sein des montagnes irano-afghanes.
La remarquable plasticité raciale qui s’observe au Maroc y a été favorisée par un isolement prononcé, sur le mode d’une insularité, à la faveur d’un jeu de reliefs résultant de la pression tectonique de l’Afrique contre l’Europe, vrai labyrinthe écoclimatique ne s’étant stabilisé qu’après la période du Sahara humide, soit il y a moins de 10.000 ans.
22 espèces de Zygènes sont actuellement connues comme résidentes en Afrique du Nord, 19 y sont endémiques (Z. elodia et Z. glaoua ici considérées spécifiquement, et y compris Z. orana nonobstant un isolat en Sardaigne) et 7 sont endémiques absolues et strictement autochtones au Maroc.
Ce mémoire présente toutes les espèces de Zygènes du Maroc, avec mentions de leurs plantes-hôtes, puis recense et énumère toutes leurs sous-espèces, voire les races locales. Cette énumération se fait du sud au nord et d’ouest en est, avec la distribution chorologique et la dynamique populationnelle propre à chaque entité infraspécifique. Pour la première fois, toutes les phénologies sont précisées. Enfin, pour chaque espèce, un diagnostic territorial de l’état conservatoire est donné en matière de bilan. C’est le résultat de 27 années de prospections marocaines avec suivis, à raison de 5 à 6 mois chaque saison, et ce, de 1990 jusqu’à ce jour. C’est aussi le triste privilège d’avoir entamé ce travail lors des dernières « belles années » de la Nature au Maroc pour assister ensuite et à vitesse grand V à une hécatombe à nulle autre pareille, laquelle s’inscrit évidemment dans le cadre du formidable écocide planétaire tout à fait ordinaire, puisqu’il n’intéresse personne …
Toutes les nouvelles vulnérabilités, les appauvrissements, les dépérissements et les présentes disparitions sont d’abord induites par la pression pastorale (élevage extensif devenu intensif…) aux dépends des ressources trophiques que sont les plantes-hôtes toujours sensibles : soit par consommation tenace des fourragères, soit par piétinement intensif pour les non appétibles ; vient ensuite le dérangement récurrent de l’espace de vol (occupation de la niche écologique) avec éviction. La cause majeure de la néantisation des biocénoses lépidoptériques au Maroc est donc le pastoralisme (troupeaux ovins et caprins, voire camelins dans le Grand Sud) avec surpâturage plus prégnant et impactant d’année en année, le plus souvent induit par une sédentarisation avec parcours permanents d’un sylvopastoralisme surnuméraire. D’autres dégâts aux habitats résultent aussi et évidemment de l’agriculture chimique, dont les affres de l’arboriculture avec traitements phytosanitaires, plus rarement des aménagements concomitants au développement économique du pays, avec ses paramètres touristico-récréatifs en des secteurs électifs au microclimat estival privilégié qui se superposent trop souvent à ceux des Lépidoptères. Enfin, il reste quelques cas non identifiés et que l’on pourrait mettre « sur le dos » du dérèglement climatique, cerise sur le gâteau global des effets anthropiques planétaires.
Pour qualifier sommairement l’état conservatoire de chaque espèce et de ses sous-espèces, j’ai plus ou moins repris les catégories du système mis au point pour l’établissement de la Liste rouge de l’UICN, résultat d’un vaste processus de concertation, d’élaboration et de validation mené par les experts de la Commission de sauvegarde des espèces du dit organisme. Ces catégories sont : Éteinte ; En danger critique ; En danger ; Vulnérable ; Préoccupation mineure. Ces critères sont basés sur différents facteurs biologiques associés au risque d’extinction : taille de la population, taux de déclin, aire de répartition géographique, degré de peuplement et de fragmentation de la répartition.
Datations des observations
Source : les premières connaissances, notamment les années du Protectorat jusqu’à la fin du 20ème siècle (témoignages bibliographiques des « Anciens »), voire jusqu’en 2010 (et depuis 1990 pour ce qui me concerne).
Période critique de dépérissements et d’effondrements avérés = première décennie du 21ème siècle.
Les Zygènes sont le reflet de ce qu’il y a en-dessous
Agents essentiels des cycles biologiques, réagissant ipso facto au moindre effet nocif (notamment au niveau des plantes-hôtes dont elles sont tributaires), par un recul ou une extinction, les Zygènes sont les véritables révélateurs pour tout diagnostic objectif d’impact écologique. Solidaires de chaque écosystème, elles s’en avèrent être les meilleurs marqueurs synécologiques. Leur lecture écosystémique se manifeste autant par leur présence que par leur absence. En ce sens, les plus signifiants ne sont pas à considérer spécifiquement mais en tenant compte de leur redondance. L’utilisation de ces données entomologiques pour une gestion à long terme exige évidemment un suivi fidèle dans un concept scientifique.
Les Zygènes sont monophages ou oligophages, et étroitement inféodés à des plantes-hôtes sensibles et vulnérables. Il s’agit donc d’une panoplie d’éminents indicateurs biologiques qui réagissent aux modifications nocives par un recul, puis par la disparition. Les « Insectes-outils » sont probablement moins maniables mais sans nul doute plus précis que les vertébrés ou les plantes, tant pour la gestion et la sélection des sites à protéger, que pour l’évaluation de l’incidence biologique en baisse des surfaces menacées, en un mot pour la conservation du patrimoine naturel au service des populations rurales fragilisées par de nouvelles donnes économiques. Les espèces parfaitement sténoèces, hautement vulnérables, ne supportant pas un équilibre rompu par la moindre intervention, pression ou nuisance, sont des bioindicatrices emblématiques de la valeur d’un milieu, aussi nommées « espèces-ombrelles » ou « espèces clés-de-voute » et veillent à la naturalité de l’habitat.
Durant une trentaine d’années, j’ai consacré la majorité de mon temps à parcourir le Maroc pour dresser un inventaire exhaustif et cartographier les sites biologiques d’intérêt patrimonial ponctuellement révélés par la présence d’un cortège de faunule génétiquement remarquable, à base surtout de Lépidoptères. Ce programme a été particulièrement insistant auprès des écosystèmes actuellement précaires car compromis par les activités humaines et comportant des présences emblématiques ou endémiques. Utilisant donc les Papillons, et notamment les Zygènes, comme un fil d’Ariane et une grille de lecture des paysages, de régions en régions, de stations en stations, il faut dire que je me suis trop souvent retrouvé « au chevet » d’une pathologie écosystémique sur un mode pandémique La pandémie dont sont victimes les Lépidoptères est parfaitement identifiée et se nomme surpâturage. 100 millions d’Ovins, de Caprins et de Camelins déciment les formations herbacées et arbustives, et les dégâts irréversibles sont hallucinants, entraînant la mort du sol. L’anachronisme le plus saillant est celui du parcours en forêt ; un exemple édifiant : un million de moutons paissent au sein des cédraies du Parc Naturel d’Ifrane, une figure de protection rendue fictive par le maintien des droits d’usage, soit un troupeau cinq à dix fois supérieur à ce qu’il devrait être. Il est des figures de conservation dont la géométrie variable est indécente. Une législation jamais pratiquée devrait établir la capacité de charge des parcours forestiers et permettrait de décider de la taille du troupeau que peut soutenir la forêt. Rien, à part une folie économique, ne peut vraiment expliquer cette croissance exponentielle et cette gestion sans le moindre discernement dont les populations vont payer cher les conséquences (désertification, érosion, lessivages, inondations meurtrières, disette des ressources en eau).
Tandis que l’on tente d’introduire le parcours extensif dans les sous-bois de l’autre rive (comme en France dans le Massif des Maures), et ce pour lutter contre l’envahissement de la végétation herbacée et ligneuse que l’on estime responsable de l’extension des incendies, alors que le pastoralisme raisonné est souvent vu comme un régulateur (cas de la vaine pâture) en certaines régions de l’Europe humide, les excès de sa phase intensive sur le dos des écosystèmes maghrébins semi-arides, fragiles et fragilisés, aboutit évidemment à l’effet inverse, au saccage, au déclin puis à l’anéantissement de la biodiversité et du substrat. Le Maroc est malade du mouton et notre « zygènomètre » est au rouge dans bien des habitats. L’alerte n’est pas nouvelle, bien des spécialistes dénonçaient l’abus d’usage dès le début du siècle passé. Ils n’étaient pas davantage entendus que ne le sont ceux d’aujourd’hui. N’en déplaise à la grande démagogie verte dont les effets sont nuls puisque cette politique est strictement conceptuelle et poudre aux yeux, captive des couloirs ministériels, des discours électoraux, de pompeux symposiums, de ridicules mascarades élitistes et autres types de gesticulations aussi ignares que stériles. Enfin pas stériles pour tout le monde quand on voit passer les millions de dollars extorqués à la Banque Mondiale ou aux pays coopérateurs pour d’illusoires études et empochés par quelques compagnies internationales acoquinées avec des bailleurs de fonds ou des administrations pas toujours recommandables. L’holocauste écologique et le biopatrimoine quasiment défunt du Maroc (et de tant d’autres pays) restent des thèmes estimés subsidiaires, sans doute parce que de nos jours, les parents n’envisagent pas le moindre devenir pour leurs enfants qui ne sont plus que des otages du consumérisme. C’est sans nul doute ce que l’on doit penser chez les décideurs et les gros propriétaires agro-pastoraux. Quand ils pensent. S’ils pensent. Ou bien leurs valises sont déjà faites pour un autre nulle part. Après eux le déluge. Quant au petit berger de sept ou huit ans, toujours en haillons et seulement scolarisé dans les statistiques, il n’a évidemment ni choix, ni pouvoir de décision. Ce sera avec lui le déluge. Mais « revenons à nos moutons », en l’occurrence à nos sublimes Zygènes. Nous les entomologistes omnivores (y-a-t-il un végétalien dans la salle à part moi ?), nous sommes curieusement passionnés par ces images chitineuses, leurs détails anatomiques et quelques subtilités taxinomiques, tandis que s’évanouissent en chaîne leurs habitats. Pathétique constat de dissonance cognitive.
Genre Zygaena Fabricius, 1775
Sous-genre Mesembrynus Hübner (1819)
Zygaena (Mesembrynus) loyselis Oberthür, 1876
Maroc, Algérie, Tunisie.
Plantes-hôtes : Eryngium bourgatii, E. campestre, E. dichotomum, E. triquetrum, E. tricuspidatum (Apiaceae). C’est souvent sur la dernière espèce citée que nous avons rencontré Z. loyselis au Maroc.
Z. loyselis mesembrina Dujardin, 1974
Locus typicus : Col du Kerdous, Anti-Atlas sud-occidental.
Distribution et dynamique : zygène très localisée en quelques vallées et sur des parcelles des versants humides dans les zones du Djebel Lekst et du Col du Kerdous où les dèmes peuvent être très chétifs, en dépit d’une présence étendue du Panicaut nourricier.
Z. loyselis fracticingulata Rothschild, 1925
L. t. : Vallée de la Réraya, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : propre au Haut Atlas central, je n’ai personnellement jamais vu cette belle sous-espèce ailleurs que dans le secteur du Tizi-n-Tamda où elle possède plusieurs localisations entre ce col et Aït-Mhammed. Sa démographie est cyclique, voire chaotique. Lors des années favorables, elle peut se montrer assez abondante à condition de la surprendre les jours de son émergence, il s’ensuit une raréfaction rapide. Appartenant à une espèce floricole, elle butine un très grand nombre de plantes basses ou élevées. Décrite du Mont Toubkal, elle y fut surtout récoltée en quelques points de la Vallée de l’Asif-n-Aït-Iren (col. Christian DOLLÉ), ainsi qu’à Tadmamte (Maison forestière d’Efkhane) et en quelques autres stations des alentours d’Asni dans les dernières décades du siècle passé. Une autre citation de la même époque provient de la route de Telouet, dans la région du Tizi-n-Tichka.
Z. loyselis ungemachi Le Cerf, 1923
L. t. : Sud-Ouest de Meknès, Oulmès, Moyen Atlas central et Pays-Zaër-Zaïane.
Races locales (nationes) ou synonymes :
olivacea Rothschild, 1925 (Nord-est de Fès, Taza, Moyen Atlas nord-oriental) ;
montana Rothschild, 1925 (Azrou, Moyen Atlas central) ;
marmarea Dujardin, 1974 (Col du Zad, Moyen Atlas centro-méridional) ;
atlantica Barragué, 1986 (Est de El-Ksiba, Moyen Atlas sud-occidental).
Distribution et dynamique : pour ce qui concerne ces sous-espèces du Moyen Atlas à bioclimat humide, je ne puis qu’attester leur grand déclin, lequel n’est pas toujours explicable par le seul impact du surpâturage. L’insecte a évidemment été gommé d’un nombre conséquent d’habitats saccagés, où même le Panicaut, Chardon adventice à toute épreuve, ne résiste pas au piétinement insistant des Ovins et des Caprins. Dès mes premiers voyages au Maroc (fin des années 1980), je ne l’ai jamais notée fréquente dans les excellents biotopes de la région d’Oulmès. Elle était par contre surnuméraire en de très nombreux secteurs du Plateau d’Ito (natio montana) où ses essaims étaient remarquables dans les prairies fraîches. Elle n’y existe plus puisque ce haut lieu de la lépidoptérologie nord-africaine a été transformé en fabrique de moutons. Certains isolats se sont maintenus non loin, juste au sud d’El-Hajeb, en cohabitation avec Z. favonia borreyi, Z. zuleima maghrebica et Z. orana tirhboulensis, et ce, jusqu’il y a une dizaine d’années où le reboisement qui servait d’ultime refuge régional a été mis à sac. Jusqu’en 2000, on voyait voler un peut partout la natio marmarea, notamment dans la plupart des secteurs propices du Col du Zad, de l’Aguelmame de Sidi-Ali, d’Inifife, des alentours d’Itzer (comme au Djebel Tarharhat) et du Tizi-n-Tanout-ou-Filalli (site forestier arasé, au sol scalpé, galvanisé, devenu stérile). Je continue de l’observer parfois aux alentours d’Aïn-Leuh, plus régulièrement et même parfois en nombre dans l’immense cuvette non loin de la Maison forestière de Senoual.
Z. loyselis xauensis Reiss, 1943
L. t. : Izilane, Rif occidental.
Distribution et dynamique : cette sous-espèce très spectaculaire par son gabarit le plus souvent trapu ne m’est connue que des hauteurs de Chefchaouen (étage perhumide), rare au Djebel Tisouka où elle émerge très tôt depuis 1 400 m jusqu’à 1 800 m au Col de Chouihat, nettement plus fréquente et parfois dense dans le grand barranco qui, depuis Melaah puis la Maison forestière de Talassemtane, accède au Djebel Lakraa où xauensis « bourdonne » jusque sur les replats sommitaux.
Z. loyselis francisi Barragué, 1986
L. t. : Aknoul, Rif oriental.
Distribution et dynamique : fort abondante lors de son pic d’émergence, surtout en fin de journée sur la partie orientale du site à Zygènes de Tizi-Ouzli qui atteste un fort regain depuis qu’il a été investi de plantations d’oliviers et d’arbres fruitiers, chassant ainsi et radicalement les troupeaux.
Z. loyselis loyselis Oberthür, 1876
L. t. : Constantine, Lambèse-Tazoult (Algérie).
Au Maroc : Atlas Tellien : Oujda et Gaada de Debdou.
Distribution et dynamique : je n’ai prélevé la forme nominative qu’au nord du Djebel de Debdou, sur le site d’Aïn-El Kbira qui m’avait été indiqué par feu mon ami Guy BARRAGUÉ. L’habitat n’existe plus. On devrait retrouver cette Zygène ça et là à la faveur des espaces collinéens de l’Oriental, plus particulièrement dans les Monts de Beni-Snassen.
Phénologie de l’espèce :
De la fin mars à fin juin, selon la latitude et l’altitude. Dans la région de Tafraoute, l’émergence des imagos de la ssp. mesembrina a lieu dès la seconde quinzaine de mars et il faut attendre les prémices du mois de juin pour voir voler la sous-espèce rifaine xauensis au plus haut des massifs du Parc de Talassemtane. Entre ces deux extrêmes bioclimatiques du Maroc, les autres sous-espèces volent dans le courant du mois de mai, que ce soit dans les Haut et Moyen Atlas, ou dans le Rif oriental.
Diagnostic : perte estimée à 25 % de sa population au Maroc. Conservation satisfaisante et colonies non affectées dans le Sud et le Nord, en grand déclin, voire en voie d’extinction dans le Centre (Moyen Atlas).
Zygaena (M.) favonia Freyer, 1844
Maroc, Algérie, Tunisie.
Plantes-hôtes : Eryngium bourgatii, E. campestre, E. dichotomum, E. triquetrum, E. tricuspidatum (Apiaceae). C’est le plus souvent sur E. campestre et E. triquetrum que j’ai rencontré Z. favonia au Maroc.
Z. favonia littoralis Rothschild, 1917
Locus typicus : Mogador (Essaouira).
Distribution et dynamique : je ne puis parler en connaissance de cause des localisations données du littoral atlantique depuis Essaouira jusqu’à Agadir par manque de prospections sérieuses à la bonne époque. Une seule fois, en mars-avril et aux environs d’Agadir, j’ai constaté deux imagos morts sur la calandre de mon véhicule, ce qui sous-entendait la traversée « aveugle » de quelques bons sites de vol ! J’ai fréquenté durant plusieurs saisons (années 2000) un habitat sublittoral constitué d’une friche dégradée par une thérophytisation avancée, blottie dans une dépression et ceinte de cultures vivrières, entre l’embouchure de l’Oued Massa et Tiznit, où favonia littoralis volait en nombre en dépit de l’état piteux des lieux. Tout le secteur a depuis été « vandalisé » par les énormes troupeaux des semi-nomades Sahraoui. J’ai découvert une modeste colonie de petites littoralis bien plus au sud, à Mesti, non loin de Sidi-Ifni, dans une erme à Figuiers de Barbarie, laquelle localisation en bioclimat aride de l’inframéditerranéen à végétation macaronésienne constitue sans nul doute la limite d’expansion vers le Sahara, non seulement de l’espèce favonia mais aussi du genre Zygaena. Dans l’arrière-pays, on rencontre cette petite sous-espèce un peu partout, pas toujours abondante, tant dans les montagnes de l’Anti-Atlas sud-occidental (nombreuses stations dans la région de Tafraoute et au Col du Kerdous) que dans celles de l’Anti-Atlas nord-occidental, par exemple aux alentours d’Aoulouz et de Taliouine. Les adultes butinent d’innombrables fleurs et inflorescences, mais surtout les Lavandes sur les collines et l’Asphodèle fistuleux sur les bermes des routes. Dois-je préciser qu’en dépit de séjours d’égales durées en ces lieux, les observations se font beaucoup plus rares et difficiles depuis une dizaine d’années, notion corroborée par quelques autres collègues acharnés, tel Jean-Marie ANDRÉ.
Z. favonia maroccensis Reiss, 1930
L. t. : Djebel Gourza, Haut Atlas central.
Synonyme : intermedia Rothschild, 1917 (Djebel Gourza, Haut Atlas central).
Distribution et dynamique : il y a pas mal de temps que le Tizi-n-Gourza, lieu de pèlerinage des entomologistes au temps du Protectorat, ne recèle plus rien. Je n’ai que très rarement observé cette sous-espèce en piémont Nord-Ouest du Toubkal d’où elle fut signalée comme courante par les Anciens (Tadmante ; environs de Tahanaoute ; base Nord du Tizi-n-Test une cinquantaine de kilomètres après Asni). Mes seuls notations sont : entre Aït-Lekak et l’Oukaïmeden, en ressaut de l’Adrar Tizerag, sur les rives de l’Assif-n-Aïn-Iren, vers 2 100-2 200 m, où d’ailleurs, fait assez rare, elle est sympatride avec Z. aurata qui prend le relai dès le niveau altitudinal suivant ; près d’Aït-Ourir (Réserve de Gourika) ; plus récemment au-dessus de Demnate, sur les rives de l’Asif Tissilt (Imi-n-Ifri) où sa présence très diluée m’a été signalée par Lucie RAZAFIMANANTSOA. Je n’ai pas la réponse à l’apparente rareté de l’espèce dans toute cette région, d’autant qu’à l’ouest (ssp. littoralis du domaine atlantique) et à l’est (ssp. borreyi des bas reliefs du domaine médio-atlasique collinéen), ses implantations sont nombreuses.
Z. favonia borreyi Oberthür, 1922
L. t. : Pays Zemmour.
Race locale (natio) et/ou synonyme : alepida Dujardin, 1974 (Forêt de Mrirt, Moyen Atlas central).
Distribution et dynamique : ce fut une Zygène classique de tout l’Ouest du Moyen Atlas et des contrées mitoyennes, jusqu’au sud-est de Rabat au travers les Pays Zaër-Zaïane et Zemmour. Son effondrement depuis plus d’une décennie se fait sur le même mode que celui de Z. loyselis ungemachi (et nationes affines), les deux espèces formant depuis toujours un binôme habituel des Panicauts. Encore une fois, le déclin de ces insectes prend en compte les graves dégâts commis aux écosystèmes qui les abritent mais fait aussi songer à des espèces « au bout du rouleau » pour se montrer de moins en moins présentes en des localités où nulle menace ne peut être vraiment désignée, si ce n’est une lente et fatale modification des conditions climatiques. Il serait oiseux d’énumérer toutes les stations anciennes de borreyi, notamment dans la région d’Azrou où, à altitude inférieure, elle remplace dès avril la plus alpine (dès 1 600 m) et estivale ssp. cadillaci de la cédraie froide. C’est avec grand peine que, chaque année, je parviens à en retrouver une colonie aux alentours d’Oulmès, quelques sujets au Djebel Zerhoun ou entre Meknès et Azrou, voire à Azrou même où le Panicaut champêtre n’est pas rare dans les allées des cerisaies non chimiquement traitées, ainsi que beaucoup plus au sud-ouest entre Khénifra et El-Ksiba où elle illustre la transition avec maroccensis.
Z. favonia cadillaci Oberthür, 1921
L. t. : Azrou, Moyen Atlas central.
Synonyme : mguilda Rungs, 1975 (Ifrane, Moyen Atlas).
Distribution et dynamique : assez fidèle à ses localisations des alentours d’Ifrane non encore dégradées, comme au Tizi-n-Tretten et au Mischliffen. Elle s’éteint progressivement du vaste secteur qu’elle habitait entre Timahdite et Itzer, ses ressources trophiques y étant piétinées par les hordes d’animaux « de bouche ».
Z. favonia excentrica Tarrier, 2017
L. t. : Tamalout, Djebel Ayachi, Haut Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : l’exiguité de la station de cette sous-espèce dans le Haut-Ansegmir illustre la présence très résiduelle d’un insecte subfossile. La précarité des lieux, dans une pâture très dégradée qui fait office de pacage quasi permanent, fait que cette Zygène revêt le statut « conservatoire » de l’extinction proche. Nous avons ici et une fois de plus un cas d’école d’un insecte dont la découverte précède de peu l’éradication.
Z. favonia ahmarensis Reiss, 1943
L. t. : Tizi-n-Tiskine, Moyen Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : je l’ai souvent rencontrée, il y a maintenant plus de 15 ans, ça et là dans les montagnes du Bou-Iblane, notamment en lisière de la petite cédraie de Tafferte, ou dans la thuriféraie plus à l’est où elle était nettement syntopique, sur deux Panicauts différents, avec aurata iblanensis. Je ne la vois plus dans le Djebel Tazzeka mais je l’ai retrouvée (2017) non loin, à Merhaoua, entre Taza et le Tizi-n-Oulmou.
Z. favonia rungsi Barragué, 1986
L. t. : Beni-Routen, Rif occidental.
Distribution et dynamique : exclusive au Pays des Beni-Routen, terroir de petite agriculture peu destructive du milieu, la colonie la plus stable et de bonne dynamique est celle syntopique avec Z. elodia kalypso et dont on rencontre assez aisément des accouplements interspécifiques (El-Had-d’Agadir-el-Krouch, entre 300 et 400 m d’altitude). Elle y butine avec ferveur les boutons de Scabieuses sur lesquels elle s’endort souvent.
Z. favonia kabylica Reiss, 1941
L. t. : Chefchaouen, Rif occidental.
Distribution et dynamique : Djebel Ben-Karriche (près de Tétouan) et alentours de Chefchaouen (rarissime au Djebel Tisouka, plus présente mais hyper localisée au Djebel Lakraa, aussi dans les friches alentours de la ville et sur les rives de l’Oued Laou). Elle fut signalée du Rif central par Axel HOFMANN.
Z. favonia thaumasta Dujardin, 1974
L. t. : Tizi-Ouzli, Rif oriental.
Synonyme : rifensis Dujardin, 1974 (Tizi-Ouzli, Rif oriental).
Distribution et dynamique : Tizi-Ouzli où elle vole conjointement avec Z. loyselis francisi, cette dernière nettement prééminente et de vol plus en hauteur. La population est stable. Aussi en quelques stations des environs immédiats d’Aknoul et au Col de Nador.
Z. favonia sebdouensis Przegendza, 1932
L. t. : Sebdou, Monts de Tlemcen (Algérie).
Au Maroc : Monts des Beni-Snassen, Djebel Kouali, Atlas Tellien. Donnée par Axel HOFMANN de Beni-Enzar, dans la banlieue de Mellila, quasiment au niveau de la mer.
Distribution et dynamique : ça et là dans les Monts de Beni-Snassen, très présente et parfois abondante sur le piémont nord du Djebel Kouali où elle butine activement les grandes Carduacées, s’y bousculant avec les Cétoines tout aussi gourmandes.
Phénologie de l’espèce :
Compte tenu de l’amplitude de sa valence écologique, depuis le littoral inframéditerranéen à isohyète de 100-200 mm jusqu’aux confins de l’étage oroméditerranéen à isohyète de 1 400 mm sur le toit du Rif, la période de vol est évidemment étalée et bien différente d’une sous-espèce à une autre. On peut voir voler favonia depuis la mi-mars dans le Sud-Ouest atlasique (et même encore plus précocement sur le littoral entre Agadir et Sidi-Ifni) jusque tard en juin dans les contrées humides et perhumides d’Azrou-Ifrane et du Rif occidental. La ssp. borreyi peut donner des émergences dès le début avril en Pays-Zaër-Zaïane, tout comme la ssp. sebdouensis, dans l’Oriental, entre Guercif et Oujda. La ssp. littoralis n’est guère repérable les années de déficit hydrique et il ne fait aucun doute qu’elle soit dotée d’une prolongation de sa diapause larvaire.
Diagnostic : perte estimée à 15 % de sa population au Maroc. De préoccupation mineure dans le Sud et dans les écosystèmes du domaine atlantique ; en danger critique (localités toutes dégradées) dans le Centre ; de conservation satisfaisante dans le Nord.
Zygaena (M.) aurata Blachier, 1905
Maroc.
Plantes-hôtes : Eryngium bourgatii et E. variifolium (Apiaceae).
Z. aurata aurata Blachier, 1905
Locus typicus : Tizi-Gourza, Haut Atlas central.
Races locales (nationes) ou synonymes :
opaca Blachier, 1908 (Amizmiz, Haut Atlas central) ;
tachdirtica Reiss, 1943 (Tacheddirt, Haut Atlas central) ;
oukaimedeina Wiegel, 1965 (Djebel Oukaimeden, Haut Atlas central) ;
toubkalensis Tarrier, Demange & Delacre, 2007 (Tizi-ou-Addi, Haut Atlas central).
Distribution et dynamique : il s’agit d’une espèce d’altitude tributaire du montagnard méditerranéen et de l’oroméditerranéen. Elle y investit bien des niches, souvent en essaims dans les montagnes au nord du Massif du Toubkal, pourvu que le Panicaut bleu (Eryngium bourgatii) ou le Panicaut panaché (E. variifolium) soient en place, voire sur des versants assez secs alors que l’espèce est plutôt hygrophile et se complaît mieux dans le milieu des mouillères. Elle ne peut être fichée comme en voie de disparition mais le recul très rapide de son habitat préférentiel que sont les pozzines (tourbières d’altitude) lui porte atteinte. Dans la quête à l’humidité, les tourbières sont gravement affectées par un pacage estival de trop nombreux mulets qui les tondent, les piétinent et les assèchent. La flore associée en est alors éradiquée. Comme type de milieu atlasique exceptionnel, il est regrettable qu’aucune directive ne soit donnée pour leur protection, qui plus est à l’aune de la désertification galopante de ces régions. Mais de toute façon, quel berger local respecterait une telle recommandation quand on sait l’anarchisme qui règne en ce domaine !
Z. aurata blachieri Rothschild, 1931
L. t. : Tizi-n-Tichka, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : connue des prairies mouillées et des tourbières du Tizi-n-Tichka et de ses alentours, comme l’Adrar Assaoul et l’Adrar Tichrt, elle existe aussi et au sein d’un même cortège sur les terrasses prairiales et spongieuses du village d’Aguelmouss, à l’ouest du Tichka, puis en montant en direction du Djebel Bou-Ourioul. Les populations du Tichka sont stationnaires. Mes récentes prospections plus ou moins pionnières du Massif du M’Goun ne m’ont guère permis de la surprendre en dépit de lieux idoines et accueillants, comme par exemple le plateau de pâtures de l’Azib-n-Ikkis, au-dessus d’Arous, dans les Bou-Guemez , où pullule sa compère régionale Z. trifolii tizina et où pousse Eryngium variifolium. Il s’agit d’un milieu protégé jusqu’en été par le maintien, de plus en plus rare, de l’agdal, cette tradition berbère du pâturage collectif dont l’ouverture ne se fait qu’en juillet, voire début août, afin de respecter l’accomplissement des cycles. Je n’ai pu en retrouver des traces très résiduelles que dans la partie la plus occidentale du M’Goun, sur les quelques mouillères encore partiellement préservées de la Haute Vallée de Tassaout, à partir de 2000 m au-dessus de Toufghine, puis entre le Tizi-n-Fedhrat et le Tizi-n-Timilill, aux alentours de 2 200 m. Elle devait habiter plus au nord, dans le secteur altimontain du Tizi-n-Outfi, où les lambeaux d’innombrables tourbières témoignent d’un récent passé favorable aux hygrophytes. Mais j’y suis parvenu un peu tard dans notre anthropocène… L’espèce qu’on ne trouve « pas » est bien souvent une espèce qu’on ne trouve « plus » et que les activités humaines ont éradiquée il y a vingt, quinze ou cinq ans, voire « hier », comme en témoignent la forêt morte et le sol décapé des lieux. Plus au sud, Z. aurata, qui en l’occurrence se serait rapportée à blachieri, n’a jamais été notée des immenses prairies humides riches en pozzines ceintes de Panicauts du Djebel Siroua que j’ai parcourues avec acharnement entre 1990 et 2000 et où j’ai constaté la grande similitude biocénotique avec le proche Toubkal, bien que ces localités soient d’identités géologiques et orographiques différentes. Cette latitude plus « saharienne » se situe probablement au-delà de la géonémie de cette espèce, bien qu’abritant encore et aux confins de 3 000 m un grand nombre de relictes.
Z. aurata iblanensis Tarrier, Demange & Delacre, 2007 (Haut Atlas nord-oriental).
L. t. : Djebel Bou-Iblane, Moyen Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : il s’agit d’un isolat que j’avais eu la bonne fortune de découvrir en juillet 1995 dans cette partie du Moyen Atlas plissé et où la Zygène fait office de subfossile d’ordre cryptozoologique. Je ne sais si elle y subsiste encore, n’y étant pas retourné depuis pas mal d’années. Il semblerait que personne ne l’y ait retrouvée, encore faut-il connaître l’écoinçon de sa modeste localisation dans la thuriféraie moribonde à l’ouest du Mousa-de-Salah ! Tout comme Z. johannae turbeti des mêmes montagnes – portée disparue depuis sa description en 1929 – il s’agit des fragiles et derniers témoignages d’espèces qui habitaient, d’est en ouest, tout le continuum de l’Atlas. Les hordes pastorales qui, de crêtes en vallées, ravagent les montagnes du Bou-Iblane, du Bou-Naceur et du Gaberaal ne sont pas là pour favoriser la pérennité de la biodiversité. Dans cette région pourtant très isolée, la Haute Vallée de l’Oued Soufouloud, pays de Cocagne des Zygènes jusque dans les années 1960, a été vidée de sa substance lépidoptérique.
Phénologie de l’espèce :
Seconde quinzaine de mai au Tizi-n-Tichka et rarement avant la mi-juin dans le Massif du Toubkal. Les imagos de l’indigénat du Moyen Atlas nord-oriental apparaissent fort tardivement, en juillet.
Diagnostic : perte estimée à 10 % de sa population globale (endémique marocain). De préoccupation mineure, exception faite des localités du Djebel Siroua (Anti-Atlas nord-oriental) et du Djebel M’Goun où l’espèce est en voie d’extinction, voire effacée.
Zygaena (M.) zuleima Pierret, 1837
Maroc, Algérie Tunisie.
Plante-hôte : Eryngium dichotomum (Apiaceae).
Z. zuleima harchaica Dujardin, 1973
Locus typicus : El-Harcha, Pays Zaër-Zaïane.
Race locale (natio) ou synonyme : maghrebica Wiegel, 1973 (Azrou, Moyen Atlas central).
Distribution et dynamique : n’ayant pas voyagé au Maroc avant les années 1990, j’ai raté quelques épisodes heureux, comme ceux où cette charmante Zygène était, à en croire mes aînés, de rencontre aisée dans la région d’Azrou ou sur le fameux (à l’époque !) Plateau d’Ito. Pour ma part, c’est à la pièce qu’en un quart de siècle j’en ai observé la présence résiduelle à El-Hajeb, à Ito et encore entre Azrou et Ifrane, ponctuellement autour du mausolée proche du Tizi-Oughmart, dans le cortège de Z. loyselis montana, Z. maroccana harterti et de la surnuméraire (mais de moins en moins car le site est cerné d’herbivores) Z. orana tirhboulensis. J’ai eu la chance d’en découvrir une petite colonie dans le Djebel Tazzeka. Sinon, l’espèce est restée en place, parfois en nombre comme dans quelques belles prairies peu pacagées non loin d’Oulmès (sur la route de Mrirt), ou sur le site d’El-Harcha où, par contre, elle est devenue de rencontre hasardeuse. L’espèce est liée aux prairies du bioclimat subhumide, voire humide.
Phénologie de l’espèce :
Fin mars à mai, avec un pic d’émergence aléatoire au gré de la température et des précipitations printanières. Très sensibles à l’hygrométrie, les émergences peuvent être localement très abondantes sous l’effet de la rosée matinale, si l’atmosphère est douce.
Diagnostic : perte estimée à 50 % de sa population au Maroc. En danger critique et même en voie d’extinction ou exterminée dans tous ses sites du Moyen Atlas, de conservation satisfaisante (mais hyper localisée) en Pays Zaër-Zaïane, avec une visibilité d’observation d’une dizaine de sujets.
Sous-genre Agrumenia Hübner (1819)
Zygaena (Agrumenia) johannae Le Cerf, 1923
Maroc.
Plante-hôte : Astragalus ibrahimianus (Fabaceae).
Z. johannae johannae Le Cerf, 1923
Locus typicus : Vallée de l’Iminène (affluent de la Réraya), Haut Atlas central.
Synonyme : charlottae Wiegel, 1965 (Djebel Angour, Haut Atlas central).
Distribution et dynamique : quasiment partout au nord du Toubkal, pourvu que l’Astragale-hôte soit une composante des pelouses, ce qui est fort souvent le cas à compter de 2.500 m. Ces colonies ne connaissent guère de fluctuations. C’est une espèce le plus souvent compagne de Z. aurata aurata du même étage altimontain.
Z. johannae infernalis Tarrier & André, 2015
L. t. : Tizi-n-Fedhrat, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : cette sous-espèce de la Cordillère du M’Goun est rarissime ! Pour l’instant, seulement connue de l’Ighil-n-Igoudamen, entre 2 600 et 3 000 m, où elle fut découverte par Jean-Marie ANDRÉ et du Tizi-n-Fedhrat où elle fut observée pour la première fois par Axel HOFMANN. J’ai eu le bonheur de l’y retrouver en ces deux secteurs. Jusqu’à nos jours, l’espèce n’avait jamais été signalée de l’immensité du M’Goun. Son immense rareté n’est que la conséquence du pastoralisme démesuré qui ravage le substrat végétal de la région.
Z. johannae berabera De Freina, 1992
L. t. : Lac Tislit, Haut Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : découverte 70 ans après la forme nominative, l’existence de cette splendide sous-espèce n’était pas évidente dans ce paysage de la steppe atlasique des hautes altitudes de l’aride contrée d’Imilchil. Elle bénéficie néanmoins de quelques sites où les planches d’Astragalus ibrahimianus sont proches de la luxuriance. Johannae berabera est autant localisée que johannae johannae est largement distribuée. Je ne l’ai jamais rencontrée sur les rives du Lac Tislit qui fut le locus typicus donné. Dès la fin des années 1990, je l’avais notée abondante un peu à l’est d’Imilchil, au Djebel Inouzan et au Tizi du même nom, à plus de 2 500 m d’altitude. À l’époque, le secteur n’était fréquenté par les troupeaux qu’à compter de juillet et les Lépidoptères, pour la plupart de présences inédites, y étaient nombreux en diversité, qualité et quantité. Dorénavant, les bergers investissent le site dès la fonte des neiges et les troupeaux sont quasiment sédentaires. Il n’y a donc plus rien, sauf johannae si rare qu’elle n’est guère repérable, au bénéfice de sa plante fortement épineuse et des xérophytes environnants, toute végétation peu ou prou récalcitrante. Mais les places de vols sont perturbées et les plantes nectarifères décimées. Il y a une vingtaine d’années que j’en connais une mosaïque de petits dèmes stationnaires et très dynamiques, installées dans des ravins ouverts à xérophytes épineux aux alentours (trop immédiats) du Douar d’Aït-Ali-Ouakou, dans les Vallées de l’Oued Melloul et de son affluent l’Asif Tilmi, au sud-est d’Imilchil. En dépit de quelques constructions de bâtiments, de batteries de ruches, du parcours de quelques chèvres et de dépôts d’ordures, la Zygène y volait encore abondamment en 2015. En 2016 et 2017, elle se fit très rare à la même date (premiers jours de juin), mais probablement pour des raisons de phénologie contrariée par une année très en retard et la suivante trop en avance ! Compte tenu de la proximité de ces colonies et de la menace anthropique avérée qui les touche, on peut, sans être pessimiste, en prédire la disparition dans les toutes prochaines années. Johannae berabera pourrait bien rejoindre les Zygènes posthumes du Maroc. À moins de la retrouver « ailleurs » dans cette vaste et peu accessible contrée, ce qui n’est peut-être pas utopique, si l’on fait vite !
Z. johannae turbeti Le Cerf, 1929
L. t. : Crête de l’Ich, Moyen Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : terme du cline spécifique allant du sud-ouest au nord-est, avec un mélanisme graduel, cette sous-espèce septentrionale « n’habite plus à l’adresse indiquée » et peut être considérée comme éteinte. Les plus récentes prospections, de talwegs en lignes de crêtes de ces montagnes d’aspect lunaire, ont été entreprises à la date idoine lors de la dernière saison par Axel HOFMANN et Jean-Marie ANDRÉ (comm. pers.). L’Astragale-hôte a été retrouvée, en nappes et bien exposée en certains endroits de la zone topotype décrite par LE CERF en 1929, mais aucun imago, ni état pré-imaginal, n’ont été perçus
Phénologie de l’espèce :
Tout début juin dans la région d’Imilchil ; de fin juin à la mi-juillet selon l’altitude dans le Massif du Toubkal et du M’Goun, premiers jours de juillet dans le Moyen Atlas nord-oriental.
Diagnostic : perte estimée à 50 % de sa population globale strictement localisée à la steppe froide à xérophytes épineux du domaine atlasique altimontain (endémique marocain). Seuls les peuplements du Toubkal n’attestent guère de régression et ne sont pas (encore) en déclin. Les sous-espèces du M’Goun (infernalis) et du Haut Atlas nord-oriental (berabera) sont sinistrées et en cours d’extermination. Quant à celle la plus septentrionale (turbeti du Moyen Atlas nord-oriental), elle est considérée comme éteinte.
Zygaena (A.) felix Oberthür, 1876
Maroc, Algérie, Tunisie, Libye.
Plantes-hôtes : Astragalus nemorosus, A. incanus, A. monspessulanus, Hedysarum humile, H. pallidum, H. perrauderianum (Fabaceae).
Z. felix deserticola Tarrier & André, 2015
Locus typicus : Tiguermine, Anti-Atlas sud-occidental.
Distribution et dynamique : la présence steppicole et présaharienne d’une espèce que l’on pensait plus montagnarde, voire altimontaine, est récente. La nouvelle ssp. deserticola est présente dans l’Anti-Atlas tant sud-occidental que nord-oriental dès l’instant que le substrat est fortement calcicole et que l’Astragale-hôte occupe un espace suffisamment vaste et tranquille : ça et là entre Tafraoute et Igherm (c’est à Aït-Abdallah que je l’ai notée pour la première fois dans les années 1990), notamment entre Tiguermine et Timzit ; à l’est et au sud de Taliouine où il existe un chapelet de petites stations jusqu’au Tizi-n-Taghatine (localité détruite) et jusqu’à Agadir-Melloul (Adrar-n-Fou-Zagorn, Djebel Agouff, Djebel Aguiguil, Tizi-n-Ounzour). Elle n’est jamais fréquente et très sporadique (fluctuations répondant aux aléas climatiques du bioclimat semi-aride). Beaucoup plus au nord-est, elle fut signalée dans les années 1970 (Guy BARRAGUÉ) des environs de Goulmima, entre Tadighoust et Imiter, dans les reliefs escarpés au nord du Tafilalet où je n’ai pu la retrouver.
Z. felix hemerocallis Dujardin, 1973
L. t. : Telouet, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : il s’agit d’une forte population étendue sur quelques kilomètres d’un versant calcaire supérieur à la petite route qui mène à Telouet depuis le Tizi-n-Tichka. Elle s’inscrit dans le cortège de six espèces qui bénéficient des trouées de la forêt de Thurifères d’une rare richesse botanique, depuis longtemps en périmètre de regénération. Comme déjà signalé pour d’autres espèces du secteur, il existe maintenant des indices de fragilisation des lieux, notamment en années sèches où les troupeaux sont alors tolérés dans les zones dites protégées.
Z. felix rolleti Dujardin, 1973
L. t. : Cirque de Jaffar, Haut Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : jusqu’il y a quelques années, cette forte sous-espèce était bien présente et souvent fréquente en plusieurs localisations où pousse le joli Sainfouin endémique au Haut Atlas oriental qu’est Hedysarum humile, depuis le Tizi-n-Talrhemt et le Tizi-n-Oufraou jusque très à l’ouest du Cirque de Jaffar. L’anéantissement de tout le Djebel Ayachi (surpâturage, déforestation) la fit disparaître, comme toute la végétation et l’entomofaune. On en retrouve parfois une trace très diluée, au profit de petits sites bénéficiant de courageuses tentatives de reboisements. Ce fut le cas en 2016 où Frédérique COURTIN-TARRIER releva la présence de quelques dizaines de pieds d’Hedysarum et, quelques semaines plus tard, de quelques imagos de feu felix rolleti.
Z. felix boursini Dujardin, 1973
L. t. : Aït-Amza, Moyen Atlas central.
Distribution et dynamique : affine à la précédente et lui prévalant en cas de synonymie, cette race ne fut jamais retrouvée sur son site méconnu d’Aït-Amza, dans la Vallée de l’Oued Guigou, entre Timahdite et Boulemane, soit à une centaine de kilomètres du Djebel Ayachi et de l’aire de rolleti. Les exemples de résonances de part et d’autre de l’écotone entre le Moyen Atlas central et le Haut Atlas nord-oriental sont pléiades. Je capture presque chaque année de rares exemplaires de cette boursini un peu plus à l’est, en façade saharienne, non loin d’Oulad-Ali-Youssef (entre les Adrars Anmoum et El-Kbir), dilués au sein d’une forte population de Z. algira kebirica. Le site est dépourvu d’Hedysarum et seule une Astragale prostrée qui doit être A. nemorosus y est discrètement présente. Z. felix boursini devait habiter une aire allant de l’Oued Guigou à l’Oued Soufouloud, au sud du Bou-Iblane, région d’antan très prolixe en Zygènes.
Z. felix zoraida Reiss, 1943
L. t. : Djebel Lechaab, Rif occidental.
Distribution et dynamique : cette Zygène est une pure merveille ! Excessivement rare, elle n’est connue que des hauts reliefs du domaine rifain situés au nord de Bab-Taza, d’accès peu aisé. Personnellement, je n’en ai noté qu’une modeste colonie très étroitement circonscrite sur les pelouses écorchées d’un replat sommital du Lakraa, syntopique avec Z. beatrix pudigua dont elle partage la ressource trophique.
Phénologie de l’espèce :
Mi-mai pour deserticola, fin mai-début juin pour hemerocallis, boursini et rolleti, fin juin-tout début juillet pour zoraida, dont la date d’apparition est assez fluctuante. D’apparition sporadique, la ssp. deserticola peut rester une année, voire davantage, sans produire d’adultes, ou se montrer en effectif très réduit sous l’influence de la sècheresse.
Diagnostic : perte estimée à 50 % de son peuplement marocain. Les isolats du Grand Sud (deserticola) sont de préoccupation mineure ; la méga population du Haut Atlas central (hemerocallis) est vulnérable car assiégée ; la sous-espèce du Haut Atlas nord-oriental (rolleti) vient d’être exterminée sans retour, toute cette contrée à laquelle elle est liée ayant irréversiblement perdu sa végétation et ses sols ; la sous-espèce de la façade méridionale du Moyen Atlas central (boursini), dont l’observation est réduite à un exemplaire chaque deux ou trois années, est quasiment éteinte ; la sous-espèce rifaine (zoraida), d’une visibilité d’observation de deux ou trois imagos dans les meilleurs cas et aux effectifs de tous temps très faibles et fluctuants, ne peut être objectivement notée.
Zygaena (A.) beatrix Przegengza, 1932
Maroc, Algérie.
Plantes-hôtes : Astragalus nemorosus, A. incanus, A. monspessulanus (Fabaceae).
Z. beatrix courtinae Tarrier, 2014
Locus typicus : Tizi-n-Tamda, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : quand j’ai récemment noté l’existence de Zygaena beatrix dans la partie orientale du M’Goun (Haut Atlas central), le Haut Atlas nord-oriental était donné comme limite de cette espèce au sud-ouest. Outre le saupoudrage de colonies qui habitent le Tizi-n-Tamda et ses alentours, au nord-ouest du Djebel Azourki, la ssp courtinae (ornementation alaire d’un rouge très prononcé) se rencontre encore plus au sud, sur le plateau de l’Azib-n-Ikkis et les pentes de l’Igoudamen (région des Aït-Bou-Guemez). Fidèle à la règle entomologique de compensation altitudinale au prorata de l’avancée latitudinale, l’espèce vole ici aux alentours de 2 500 m (1 500 m dans le Rif oriental).
Z. beatrix metaxys Dujardin, 1973
L. t. : Cirque de Jaffar, Haut Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : de l’incommensurable nombre de stations où cette Zygène abondait il y a seulement une quinzaine d’années, faute du maintien du substrat végétal, il ne reste quasiment rien, ni au Cirque de Jaffar, ni ailleurs dans le Djebel Ayachi où elle était, encore il y a peu, de rencontre obligée. Même pronostic d’éradication sur le Plateau des Lacs d’Imilchil et dans les Hauts Todra et Dades (Tizi-Tirherhouzine, Tizi-n-Ouguern-Zegzaoune et Tizi-n-Ouano) où les stations sont scalpées par un pastoralisme chaque fois plus présent et pesant.
Z. beatrix felicina Reiss, 1944
L. t. : Tizi-n-Tiskine, Moyen Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : même problématique de disparition que pour la précédente sous-espèce, le Djebel Bou-Iblane, la région de Boulemane et de Timahdite, tous les alentours du Col du Zad, le Djebel Tarharhat (Itzer), le Tizi-n-Ifar plus à l’ouest, ex-habitats de profusion, sont désormais voués à l’oviculture. De fragiles dèmes sont ça et là en sursis (Tabourite, Inifife, Senoual), mais les fortes implantations ont toutes été balayées et il ne restera rien de felicina d’ici quelques brèves années.
Z. beatrix albertii Wiegel, 1973
L. t. : Bab-Bou-Idir, Moyen Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : disparue de Bab-Bou-Idir, localité entomologique du temps du Protectorat, présentement investie tant par les activités récréatives du centre d’estivage ayant laminé toutes les composantes de l’écosystème, que par les activités agricoles sur tout le plateau fertile, je n’en connais plus que de chétives colonies dans la région de Merhaoua et du Tizi-n-Oulmou où elle partage ses niches avec Z. favonia amahensis et Z. youngi timeliltica.
Z. beatrix pudiga Reiss, 1944
L. t. : Bab-Selham, Rif occidental.
Distribution et dynamique : demeure abondante et sans fluctuation populationnelle, tant en lisière et dans les ouvertures de la sapinière de Talassemtane, qu’au-dessus de l’étage forestier, sur la dorsale du Lakraa.
Z. beatrix ouzlii Hofmann & Reiss, 1984
L. t. : Tizi-Ouzli, Rif oriental.
Distribution et dynamique : cette sous-espèce très localisée est toujours en place à la faveur de l’excellente conservation du site. Sensible car quasiment exclusive des lieux. Elle fut néanmoins signalée de Taguiouine, à l’est de Ketama (Rif central) par Axel HOFMANN.
Phénologie de l’espèce :
Mai-juin pour toutes les sous-espèces et leurs localisations.
Diagnostic : perte estimée à 75% de son peuplement au Maroc. Ce pourcentage de perte pourra surprendre ceux de nos collègues qui auraient visité le Maroc il y a seulement une dizaine d’années et conservé un souvenir de profusion de cette espèce qui conférait encore à la vétille, notamment dans l’écotone entre Moyen Atlas central (secteur du Col du Zad) et Haut Atlas nord-oriental (région du Djebel Ayachi). Ce sont justement ces forts peuplements qui ont été victimes du formidable écocide orchestré dans cette région et, des ssp. metaxys et felicina, il ne reste plus que des individus erratiques issus d’ultimes pieds de l’Astragale prostrée qui en est la plante nourricière. La fin des sols est sans doute le plus grave problème du pays, c’est bien pourquoi le personnel politique s’en détourne allègrement. Les isolats étriqués du Haut Atlas du M’Goun, du Rif occidental et du Rif oriental ne sont pas impactés et s’avèrent de préoccupation mineure, l’unique souci étant l’exigüité de leurs aires respectives, souvent proches de la peau de chagrin. C’est parce qu’il ne reste que ceux-ci qui soient épargnés et que les colonies majeures sont éradiquées que la population globale de Z. beatrix est désormais préoccupante et évaluée comme en danger critique.
Zygaena (A.) youngi Rothschild, 1926
Maroc.
Plantes-hôtes : Ononis cristata et O. fruticosa ; beaucoup plus rarement sur O. natrix, O. thomsonii et O. viscosa ; aussi sur O. spinosa antiquorum (site de Tamaloute, Haut Atlas nord-oriental) (Fabaceae).
Zygaena youngi occidentalis (en attente de description)
Holotype. Mâle, Tizi-n-Tamda, Maroc, nord-est d’Ait-Mhammed, massif du M’Goun, Haut Atlas central, 2 300-2 400 m, 24-VI-1999, M. TARRIER leg. (coll. J. Demange). Paratypes. Très nombreux mâles et femelles, même origine, V et VI-1999, 2002, 2012 et 2017, M. TARRIER leg. (nombreuses collections publiques et privées). [6]
Sujets de gabarit très petit, et non pas de grande taille (pour l’espèce) comme l’est la ssp. peripelidna qui la relaie à l’est, au niveau du Haut Atlas nord-occidental ; l’envergure est même souvent moindre que celle de la forme nominative du Moyen Atlas et plutôt similaire à celle de la ssp. rifaine marteni qui occupe l’opposé du territoire de l’espèce. La maculation n’est jamais coalescente, comme c’est surtout le cas pour peripelidna et les taches bien séparées sont le plus souvent bordées d’un liseré blanc, y compris chez le mâle.
Ainsi qu’on le perçoit à l’énumération des caractères de l’habitus, Zygaena youngi n’obéit nullement à la règle clinale et graduelle qui est celle de bien des Zygènes et la nature de taille et de pattern se fait sans ordonnance du sud-ouest au nord-est. À l’ouest du Haut Atlas du M’Goun et de l’aire d’occidentalis, dans le secteur du Tizi-n-Tichka et dans des condition bioclimatiques plus accueillantes, on trouve sur un site fortement calcaire Z. glaoua, grande et de forme générale beaucoup plus ronde, avec la couleur de fond des ailes nettement plus noire et qui fait penser à une petite Z. maroccana. Décrite comme espèce indépendante, Z. glaoua est considérée comme une sous-espèce de Z. youngi par certains auteurs.
J’ai découvert cette nouvelle entité au Tizi-n-Tamda où elle est alticole, confinée sur la parcelle ouverte d’un haut versant septentrional souvent battu par le vent où elle vit sur Ononis cristata. C’est l’habitat le plus altimontain de l’espèce, à l’étage des xérophytes épineux, appelé « zone de combat » en raison de la rigueur climatique. Les imagos n’y volent que rarement lorsque le temps est vraiment serein. Immédiatement sur le versant opposé se situe le dème topotypique de Z. beatrix courtinae, sur Astragalus nemorosus. Les deux Zygènes sont sympadrides mais aucun cas de syntopie n’a été observé, et ce, en dépit de la franche mitoyenneté. La localisation respective des plantes-hôtes dicte cette ségrégation.
Z. youngi peripelidna Dujardin, 1973
Locus typicus : Cirque de Jaffar, Haut Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : cette sous-espèce majeure faisait l’apanage du cortège zygénologique de bien des sites du Djebel Ayachi et se complaisait aussi, surnuméraire, dans les petites prairies sylvatiques du Tizi-Tannout-ou-Fillali dans le proche Moyen Atlas méridional. Elle a sombré avec le saccage de ces localités désormais vouées au surpastoralisme qui rime avec « no future ». Après plus de dix années de disparition, Frédérique COURTIN-TARRIER l’a tout récemment retrouvée un peu à l’ouest, sous la forme d’une minuscule colonie subsistant non loin de Tamaloute, dans le Haut-Ansegmir, dème résiduel et bien fragile qui ne compense nullement la perte des populations cardinales.
Z. youngi youngi Rothschild, 1926
L. t. : Azrou, Moyen Atlas central.
Races locales (nationes) ou synonymes :
rothschildiana Reiss, 1930 (= media Rothschild, 1926) (Aguelmane de Sidi-Ali, Moyen Atlas central) ;
bekritica Reiss, 1943 (Bekrit, Moyen Atlas central) ;
crateris Wiegel, 1973 (Mischliffen, Moyen Atlas central).
Distribution et dynamique : la forme nominative est celle des bioclimats subhumides et humides de l’étage montagnard méditerranéen du Moyen Atlas central. On pourrait dire qu’elle volait « partout » : Massif du Kandar, Ifrane (des dizaines de colonies), Mischliffen, Djebel Hebri, alentours de Timahdite, Tizi-n-Tafoucht, région de Bekrite et de Senoual, Foum-Khereg, Inifife, Aguelmane de Sidi-Ali, Col du Zad et alentours, région d’Itzer (comme au Djebel Tarharhat), Tizi-n-Rechou, Tizi-n-Iffar…. Elle subsiste, encore abondante, en quelques sites protégés par un périmètre de régénération respecté au Tizi-n-Tretten, au Mischliffen et au Djebel Hebri, en lisière ou en clairière de la cédraie mixte.
Z. youngi timeliltica Reiss & Reiss, 1973
L. t. : Timelilt, Moyen Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : indigène du Djebel Tazzeka et anciennement confinée en quelques stations des alentours de Bab-Bou-Idir, cette sous-espèce, de grande taille pour l’espèce, ne se maintient qu’un peu plus au sud, dans la région du Tizi-n-Oulmou où elle est rare.
Z. youngi marteni Reiss, 1943
L. t. : Bab-Selham, Rif occidental.
Distribution et dynamique : toujours hyper abondante aux meilleures altitudes du Djebel Lakraa, là où le substrat végétal est ras, dans les biocénoses des rocailles et sur les pelouses lacunaires, jamais loin de la forêt d’Abies maroccana. Je n’ai jamais rencontré cette fine sous-espèce ailleurs dans le Rif occidental et central où pourtant les biotopes idoines ne manquent pas.
Phénologie de l’espèce :
Mai-juin, parfois dès avril pour la forme nominative dans ses sites privilégiés du Moyen Atlas, jamais avant juin dans le Rif occidental.
Diagnostic : perte estimée à 25 % de sa population globale (endémique marocain). Les sous-espèces du Haut Atlas nord-oriental (peripelidna) et du Moyen Atlas nord-oriental (timeliltica) sont les seules en voie d’extinction faute de sites conservés et indemnes. Le reste de la population du territoire marocain est de conservation satisfaisante, bien que non à l’écart des pressions pastorales.
Zygaena (A.) glaoua Wiegel, 1973
Maroc.
Plante-hôte : Ononis cristata.
Z. glaoua Wiegel, 1973
Locus typicus : Telouet, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : belle Zygène le plus souvent considérée comme sous-espèce de Z. youngi, elle est indigène au versant calcaire de la montagne qui précède Telouet en venant du secteur du Tizi-n-Tichka. Il en existe une modeste mosaïque de colonies, toute dépendantes de la bonne conservation « miraculeuse » d’un très ancien reboisement. Elle disparaitra quand la pression environnante de l’élevage aura vaincu définitivement ce périmètre, ce qui ne va pas demander trop de temps. Z. glaoua connait de fortes fluctuations induites tant par les périodes de sècheresse que par les débordements chroniques des troupeaux car l’Ononis-hôte tapissante y est fragile et fragilisée.
Phénologie de l’espèce :
Dès la fin mai et vole tout juin.
Diagnostic : perte estimée à 75 % de sa population (endémique marocain). Indigène d’un seul habitat et en danger très critique.
Zygaena (A.) maroccana Rothschild, 1917
Maroc.
Plantes-hôtes : Ononis spinosa antiquorum, très rarement O. natrix et non confirmé sur O. fruticosa (Fabaceae).
Z. maroccana maroccana Rothschild, 1917
Locus typicus : Mogador (Essaouira).
Distribution et dynamique : la forme nominative est liée à une écorégion des formations arborées macaronésiennes du littoral atlantique (semi-aride de l’étage inframéditerranéen), c’est à dire entre Essaouira et Agadir, toujours dans l’arganeraie et parfois en frange des dunes maritimes : Ounara, Essaouira, Smimou ; aussi au Tizi-Maachou (sud d’Imi-n-Tanoute) et dans la Vallée des Ida-Outanane. Ne fréquentant plus cette contrée au maigre potentiel lépidoptérique depuis plus de deux décennies, je ne puis attester le maintien de la Zygène qui n’était pas rare à l’époque.
Z. maroccana kerdousensis Hofmann & Reiss, 1982
L. t. : Col du Kerdous, Anti-Atlas sud-occidental.
Race locale (natio) ou synonyme : lekstina Tarrier & André, 2015 (Tizi-n-Tagounit, Anti-Atlas sud-occidental).
Distribution et dynamique : bien présente dans tout l’Anti-Atlas sud-occidental, bien qu’avec de fortes fluctuations, c’est une sous-espèce qui n’a pas trop à pâtir du surpâturage quasiment inexistant dans cette région mais qui souffre objectivement du chaos climatique et de la désertification locale (dont l’indice est la disparition de l’Amandier qui était une culture locale). Les principaux secteurs de ses localisations sont, d’ouest en est : au Col du Kerdous et ses alentours occidentaux ; dans l’essentiel du Djebel Lekst où les sujets sont « énormes » dans les basses vallées comme non loin de Sidi M’Zal et où la natio alticole lekstina, de très petite taille, se manifeste dans les prairies subhumides à plus de 1 600 m ; ainsi qu’aux quatre points cardinaux d’Igherm, avec une niche franchement présaharienne au sud de l’Adrar-n-Aklim, en direction de Souk-Tleta-de-Tagmoute. En complément d’information, le lecteur consultera plus après le statut de Z. lucasi interposita.
Z. maroccana souktanaensis Tarrier & André, 2015
L. t. : Taliouine, Anti-Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : cette nouvelle entité fut décrite des proches alentours à l’est de Taliouine, vers 1 200 m, où elle semble très sporadique, pour étendre son aire jusqu’aux limites du Plateau de Tazenakht où, à la faveur du remplacement d’Ononis spinosa par O. natrix, c’est ensuite Z. lucasi qui prend le relai. Elle habite la lisière des champs, les petits ravins, les lits d’oueds secs et les bermes des routes, au profit de sa plante nourricière, véritable « mauvaise herbe ». S’étend au sud et vers le Djebel Bani jusqu’au Tizi-n-Ounzour (sud d’Agadir-Melloul). Une autre implantation plus stable et bien plus montagnarde existe au nord de Taliouine, peu avant Askaoun, aux alentours d’Asgaourt dans le Djebel Siroua.
Z. maroccana gundafica Reiss & Tremewan, 1960
L. t. : Casbah Tagoundaft, Haut Atlas central.
Races locales (nationes) ou synonymes :
irhris Wiegel, 1965 (Tadmante, Haut Atlas central) ;
fulgens Dujardin, 12973 (Plateau du Yagour, Haut Atlas central) ;
testensis Reiss & Reiss (Tizi-n-Test, Haut Atlas central).
Distribution et dynamique : Z. maroccana gundafica et ses nombreuses races locales correspondent au complexe le plus malmené de l’espèce en raison de l’incessant piétinement des planches d’Ononis par des troupeaux de plus en plus surnuméraires et de plus en plus sédentaires de chèvres, avec souvent l’édification de bergeries sur place, impact anthropique s’ajoutant à l’érosion galopante des lieux. Je n’en constate plus la présence que dans la Haute Vallée de l’Asif-n-Aït-Iren (sous l’Oukaïmeden), dans des jardins ou sur des terrasses d’arboriculture (jusqu’à maintenant peu désherbées et non traitées chimiquement), ainsi que dans les cimetières berbères. Ces derniers lieux « saints » s’avèrent être de véritables cas d’école en matière de perennisation, tant pour la flore que pour la faunule, puisque leur atout écologique est d’être interdits au cheptel et jamais ni défrichés, ni piétinés. De façon diluée, la Zygène vole encore dans les quelques écoinçons les plus éloignés des troupeaux sur le versant Sud du Tizi-n-Test. Je ne sais rien de la situation actuelle de la natio fulgens du Plateau du Yagour.
Z. maroccana tichkana Wiegel, 1973
L. t. : Tizi-n-Tichka, Haut Atlas central.
Synonyme : taddertica Dujardin, 1974 (Taddert, Haut Atlas central).
Distribution et dynamique : bien connue des prairies mouillées et souvent sur les rives des ruisseaux du plateau des pâturages immédiatement au nord du Tizi-n-Tichka, cette sous-espèce s’y maintient en dépit du dérangement des transhumances qui s’y rendent de plus en plus tôt en saison, besoins économiques grandissants… La qualité florifère des lieux est un atout pour la conservation d’une espèce dont les imagos sont très floricoles. Elle cohabite avec Z. aurata blachieri et Z. trifolii tizina.
Z. maroccana andrei Tarrier, 2014
L. t. : Tighirt, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : Z. maroccana n’avais jamais été appréhendée dans le Massif du M’Goun où elle se montre commune dans les formations herbacées de fauche tardive à l’ouest du dit Massif, depuis les alentours d’Imi-n-Ifri (prairies et friches des rives de l’Asif Tissilt) à quelques 1 000 m jusqu’à la Haute Vallée de l’Oued Tassaout, à Toufghine et bien plus au sud vers le Tizi-n-Fedhrat, jusqu’à 2 000 m et plus. Le locus typicus de cette sous-espèce praticole aux caractères ségrégatifs bien tranchés est Tighirt.
Z. maroccana harterti Rothschild, 1926
L. t. : Azrou, Moyen Atlas central.
Distribution et dynamique : la présence de Z. maroccana harterti est très en recul comme tout insecte appartenant à l’entomocénose du Moyen Atlas du secteur d’Ifrane-Azrou où la concurrence entre Homo economicus et la Nature ne fait pas de cadeau à cette dernière. Elle a majoritairement disparu des alentours d’Ifrane comme de ceux d’Azrou, que ce soit dans les friches, les prés et les champs, comme dans les espaces d’arboriculture où les traitements phytosanitaires sont désormais « musclés ». Elle maintient encore une population dense et stable en lisière des vieilles cerisaies entre Aïn-Leuh et Mrirt, à Boudra et non loin de la Zaouïa d’Ifrane. Je viens d’en noter un isolat tout à fait au sud-ouest de son aire, dans la région de Khénifra, au lieu-dit Tezerdiwine, juste au sud d’El-Kebab, au bord d’un ruisseau où l’espace n’est pas pâturé grâce à l’existence d’un verger vivrier.
Zygaena maroccana incognita (en attente de description)
Holotype. Mâle, autour du cimetière de Sidi Beaknadel, près du Tizi-n-Mouzemmour, entre Es-Sebt et Adarouch, sud de Meknès, Moyen Atlas central, 900 m, 4-IV-2014, M. TARRIER leg. (coll. J. Demange). Paratypes. Nombreux mâles et femelles, même localité et entre Adarouch et Azrou, par R7201, 900 m, III et IV-2014, 2015 et 2016, M. TARRIER leg. (coll. J. Demange et nombreuses collections publiques et privées).
De forte à très forte taille, il s’agit de la race de plaine de la ssp. harterti décrite d’Azrou et qui peuple les reliefs du Moyen Atlas généralement de 1 200 à 1 700 m. Z. maroccana incognita est à maroccana harterti ce que Z. favonia borreyi est à l’alticole favonia cadillaci. L’imago vole fin mars, tandis que harterti n’émerge que fin mai. La plante nourricière de la larve est la Bugrane épineuse, ici assez peu fréquente, d’où la paucité des stations. Ces petites localisations n’avaient jamais été repérées et illustrent au nord-est et non loin de Meknès une nouvelle avancée géonémique de l’espèce, avant le territoire du vicariant Z. marcuna qui prend le relai dans le Rif.
Phénologie de l’espèce :
Les imagos sont très précoces dans le Sud-Ouest de l’Anti-Atlas, même en haute altitude, où ils émergent dès février et volent jusqu’à fin avril ; seconde quinzaine de mai partout ailleurs dans les sites du Haut Atlas et du Moyen Atlas.
Diagnostic : perte estimée à 15 % de sa population globale (endémique marocain). Conservation satisfaisante. Parce ce que tributaire d’une plante-hôte récalcitrante et résistante aux troupeaux comme au défrichage, pouvant pousser un peu partout, Z. maroccana est la Zygène qui tire le mieux son « épingle du jeu ». Quelques localisations du Haut Atlas sont en dépérissement, d’autres sont ça et là malmenées, mais cela reste encore de l’ordre de l’anecdote.
Zygaena (A.) lucasi Le Charles, 1947
Maroc.
Plante-hôte : Ononis natrix (Fabaceae).
Z. lucasi lucasi Le Charles, 1947
Locus typicus : Gorges du Dadès et Gorges du Todra, Haut Atlas central.
Race locale (natio) ou synonyme : saounica Reiss & Reiss, 1974 (Aït-Saoun, 40 km sud-ouest de Ouarzazate, Haute Vallée du Drâa).
Distribution et dynamique : jamais omniprésente en raison du bioclimat ingrat et des précipitations infidèles qui le régissent, cette Zygène peut émerger par myriades ou se montrer non repérable, voire absente de ses stations. Il suffit d’évaluer l’état de la Bugrane-hôte, avec laquelle elle co-évolue et réagit, pour supputer la présence saisonnière de la Zygène. Conséquence des années sèches, si la plante est en somnolence, lucasi le sera aussi. Son aire s’étend de la Vallée du Dades au Plateau de Tanezakht (y compris les deux versants du Tizi-n-Bachkoum), jusqu’à la Vallée de l’Oued Tamsift et celle du Haut-Drâa (notamment de part et d’autre du Tizi-n-Tinififft). Ses meilleurs refuges sont aussi les meilleures localisations de la Bugrane jaune : rives des oueds temporaires des mesetas, dépressions, ravins et bermes des routes, voire jardins aux alentours des villages. Ces populations ne sont guère victimes de facteurs anthropiques, sauf du passage occasionnel de troupeaux qui malmènent les Bugranes non appétibles.
Z. lucasi interposita Tarrier & André, 2015
Locus typicus : Tiguermine, Anti-Atlas sud-occidental.
Distribution et dynamique : si l’immense majorité de Z. maroccana se nourrit d’Ononis spinosa, Z. lucasi, qui lui est affine, est monophage sur O. natrix. C’est ainsi qu’a pu être appréhendée cette « curieuse maroccana » qu’est lucasi interposita dont la population vient s’intercaler au cœur même du vaste domaine de maroccana dans l’Anti-Atlas sud-occidental, strictement là où intervient Ononis natrix, soit aux environs de Tiguermine. Peu avant Igherm, ponctuellement à Imaoune, on retrouve subitement la Bugrane épineuse et son parasite Z. maroccana. Plus au nord-est, une fois passé le Tizi-n-Taghatine, sur la meseta de Tazenakht, c’est le domaine de lucasi lucasi, à la faveur de l’omniprésence d’Ononis natrix, et ce, jusqu’au Bas-Dadès à l’est.
Phénologie de l’espèce :
Mi-mars à mi-avril dans les régions semi-désertiques du Bas-Dadès, du Bas-Todra et du Haut-Drâa, ainsi qu’aux alentours de Ouarzazate et de Tazenakht ; pas avant la mi-avril dans l’Anti-Atlas sud-occidental (ssp. interposita).
Diagnostic : perte estimée à 10 % de sa population globale (endémique marocain). Pour une raison identique à celle de l’espèce précédente, cette espèce du même complexe est de conservation satisfaisante, seuls les aléas climatiques du réchauffement, avec la raréfaction croissante des précipitations aux limites de l’aride, portent sporadiquement atteinte à cette espèce steppicole.
Zygaena (A.) marcuna Oberthür, 1888
Maroc, Algérie, Tunisie.
Plante-hôte : Ononis natrix (Fabaceae).
Z. marcuna tingitana Reiss, 1937
Locus typicus : Izilane, Rif occidental.
Distribution et dynamique : Zygaena marcuna remplace au nord Z. maroccana (espèces géminées) et la ssp. tingitana est celle de la Péninsule tingitane et plus particulièrement des reliefs occidentaux de la Cordillère rifaine. L’existence de la Bugrane jaune, dite aussi Coquesigrue ou Bugrane puante, implique celle de la Zygène qui n’y connait guère de menaces, ni de nuisances. Plus vaste est le peuplement de Coquesigrue et plus évidente est la présence de marcuna, mais les quelques pieds d’un modeste pan peuvent tout aussi bien être fréquenté car l’espèce est très active et susceptible de nouvelles conquêtes opportunistes. À ma connaissance, les populations les plus dynamiques résident sur le versant occidental du Djebel Tassaot, ainsi qu’un peu partout autour de Talembote, et en montant depuis Chefchaouen au Djebel Tisouka. Les ravins protégés sont les niches électives.
Z. marcuna delicioli Wiegel, 1973
L. t. : Tizi-Ouzli, Rif oriental.
Distribution et dynamique : vole à foison dans sa localité typique, ainsi qu’un peu partout au nord d’Aknoul et au Col de Nador. Je l’ai trouvée entre Smila et Taineste, au nord-ouest de Taza et Axel HOFMANN l’a signalée du Rif central, à Taguiouine, non loin de Ketama.
Z. marcuna ahmarica Reiss, 1944
L. t. : Djebel Ahmar, Moyen Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : cette sous-espèce n’a jamais été retrouvée au Djebel Ahmar, dont personne ne sait s’il s’agit vraiment de la bonne localité d’origine. Je l’ai appréhendée en nombre dans les années 1990 sur tout le Massif du Debdou, depuis la Gaada au sud jusqu’a la Maison forestière sise au-dessus du village de Debdou au nord, au lieu-dit Aïn-El-Kbira, où notre collège Guy BARRAGUÉ la prenait aussi dans les années 1970. La Zygène était liée à une petite espèce ou sous-espèce locale d’Ononis jaune d’un port très prostré. Toutes ces localités n’existent plus, l’entièreté du Massif, partie plissée comme secteur tabulaire, a été écocidé d’une façon effroyable par une pression pastorale équivalente à on ne saurait combien de bulldozers, les sols y sont scalpés, décapés, laminés, galvanisés, compactés, perdus. Le napalm ne ferait pas mieux ! On se demande ce que les moutons y pâturent maintenant, en dehors des compléments alimentaires stockés devant les bergeries de fortune. La Zygène est donc portée disparue mais il reste bien des prospections qui pourraient la ressusciter, par exemple dans les vallées et les montagnes situées entre l’extrémité orientale du Djebel Bou-Iblane et la Basse-Moulouya de la région de Guercif.
Z. marcuna tlemceni Slaby, 1974
L. t. : Mont de Tlemcen (Algérie).
Au Maroc : Monts de Beni-Snassen, Atlas Tellien.
Distribution et dynamique : frontière naturelle à pouvoir d’exclusion, la Basse-Moulouya marque le passage de la faunule marocaine à celle d’influence algérienne. C’est le cas pour plusieurs Rhopalocères maghrébins et c’est aussi le cas attesté par quelques Zygènes comme Z. favonia sebdouensis, Z. loyselis loyselis et Z. marcuna avec tlemceni qui, dans l’Oriental marocain, est étroitement cantonnée à l’étage mésoméditerranéen des Monts de Beni-Snassen, à l’ouest d’Oujda. Je la connais des alentours de Taforalt, au-dessus de la petite Vallée du Zegzel, ainsi que de la piste à Beni-Amer où elle se manifeste chaque fois qu’intervient Ononis natrix. Pour la découvrir, le tout est de coïncider avec sa phénologie parfois un peu aléatoire. Très active, elle butine les Lavandes, les Thyms et les grandes Carduacées. Elle ne dédaigne pas le périmètre des champrs céréaliers où, tôt le matin, on la découvre au repos.
Phénologie de l’espèce :
Les imagos des ssp. delicioli et ahmarica sont les plus précoces et volent peu avant la mi-mai, ceux de la ssp. tlemceni sortent fin mai et ceux de tingitana mi-juin.
Diagnostic : perte estimée à 25 % de sa population au Maroc. La ssp. ahmarica du Moyen Atlas nord-oriental est la seule portée éteinte, réduite à néant par un surpâturage à nul autre pareil du seul masssif dont je la connaissais. L’espoir de la retrouver ailleurs et en une meilleure posture n’est pas perdu. Bien que souvent rudérales et donc exposées à aux agents anthropogènes, les autres sous-espèces marocaines sont de conservation satisfaisante.
Zygaena (A.) excelsa Rothschild, 1917
Maroc, Algérie.
Plante-hôte : Coronilla juncea (Fabaceae).
Z. excelsa rosei Hofmann, 1980
Locus typicus : Tizi-n-Oufraou, Haut Atlas nord-oriental.
Synonyme : ourania Dujardin, 1981 (Cirque de Jaffar, Haut Atlas nord-oriental).
Distribution et dynamique : entre 1990 et 2000, j’avais répertorié 4 populations de cette rareté qui ne se manifeste que là où la Coronille à tige de Jonc possède de très vieilles implantations et montre des pieds d’un âge certain pouvant atteindre le port d’un mètre. De découverte difficultueuse, les bonnes stations sont celles sises au profit d’une faible dépression dans un « océan » d’Alfa (Stipa tenacissima), ce qui n’est pas repérable de loin. Les colonies connues étaient comprises entre Rich au sud-ouest et Outat-Oulad-El-Haj au nord-est : le Djebel Aberdouz dans le Haut-Ziz (autour de Tirhibout), le Djebel Ayachi (au Tizi-n-Oufraou qui est la localité typique), Outat-Al-Fayja (entre Tamayoust et le versant Sud du Tizi-Tarhzeft), puis à Oulad-Ali-Youssef, au pied du Djebel Gaberaal. La Zygène a disparu des trois premières localités où la Coronille est abroutie sous la dent des chèvres, des mulets et des chameaux. La station d’Outat-Al-Fayja, fruit de mes prospections pédestres dans cet immense univers alfatier, était très prolixe en excelsa et on pouvait la voir voler par dizaines, tel un gros Hyménoptère, et le spectacle des accouplements sur les tiges était somptueux. Cette steppe a été investie par des semi-nomades reconvertis au sédentarisme (sous des tentes de fortune en polyéthylène…) et la Coronille est cisaillée nette au sol suite non seulement aux parcours ovins et caprins, mais aussi au pacage d’Équidés et de Camelins… Il reste à l’appel la colonie d’Oulad-Ali, fortement mésétienne et présaharienne, au nord de Missour, très vigoureuse, de présence indéfectible jusqu’à maintenant, condensée en lisière d’une oliveraie qui occupe tout un bassin et où se développe une belle formation de la Coronille à tige de Jonc. L’irruption de hordes de chèvres y est récurrente, chaque printemps voit davantage de Coronilles tondus et la situation s’annonce fragile. Après quoi, nous ne verrons plus d’excelsa rosei. Je rappelle que les Coronilles, plantes électives de plusieurs espèces de Zygènes, sont éminemment fourragères, d’où la difficulté de les conserver dans un pays pastoral sans surveillance et où l’on prône l’inéquation entre le nombre de têtes et les ressources somme toute précaires d’une contrée aride.
Z. excelsa jeradica Dujardin, 1981
L. t. : Col de Jerada, Atlas Tellien.
Distribution et dynamique : la colonie du Col de Jerada n’existe plus, pas davantage celle, finissante, que j’avais notée au nord d’El-Aïoun. Excelsa jeradica n’existe donc plus, jusqu’à preuve du contraire car l’univers de l’Oriental est vaste, et très limité est notre pouvoir prospectif.
Phénologie de l’espèce :
Mi-avril à mi-mai, selon que les habitats se trouvent directement influencés par la steppe désertique ou reculés dans les vallées ; émergences pionnières dès les premiers beaux jours d’avril dans les habitats les plus favorisés où l’on peut alors voir les imagos d’un rouge vif butiner les fleurs des arbres fruitiers. Il s’agit d’une espèce floricole par excellence, au vol vif, rapide et élevé.
Diagnostic : perte estimée à 75 % de sa population marocaine. La ssp. jeradica est portée éteinte et des quelques localisations de la ssp. rosei, il n’en reste qu’une qui ne soit pas sinistrée. Ne bénéficiant d’aucune figure de protection, autant dire que la belle et précieuse Z. excelsa est sur la « pente savonneuse » et répertoriée comme en danger critique.
Zygaena (A.) alluaudi Oberthür, 1922
Maroc.
Plantes-hôtes : Coronilla minima et plus rarement (Sud) C. juncea (Fabaceae).
Z. alluaudi lamprotes Dujardin, 1973
Locus typicus : Idni, Haut Atlas sud-occidental.
Distribution et dynamique : cette remarquable sous-espèce de phénologie automnale et morphologiquement très caractérisée, aux sujets de fort gabarit, à la livrée nettement orangée et qui illustre la limite géonémique de l’espèce au sud-ouest, est surtout connue de sa localité typique d’Idni, sur le versant méridional du Tizi-n-Test. Sans trop de fluctuations, hyper localisée, elle y demeure d’une remarquable densité, y compris les années de déficit hydrique tout à fait néfaste à Z. algira selenion qui fréquente en fin de printemps le même habitat. Le monovoltinisme de fin d’été très caractéristique de lamprotes pourrait être attribué à une éventuelle compétition écologique avec algira. Mais ce postulat ne résiste guère à l’examen quand on sait le nombre de cas où ces deux espèces partagent la même Coronille-hôte en une même niche écologique, sans la moindre adaptation phénologique. De toute évidence, il appert que le report d’émergence de lamprotes lui est tout à fait favorable, bénéficiant en fin de saison de l’apport des pluies ascensionnelles (rosée) qui se manifestent particulièrement en cette partie du Grand Atlas favorisée par sa proximité océanique. C’est une véritable opportunité lors d’années sèches durant lesquelles les espèces printanières comme algira et maroccana ne sont repérables sur aucun versant du Tizi-n-Test. Hors le site d’Idni, la répartition de cette sous-espèce est enrichie de quelques dèmes bien plus chétifs et satellites au fil de la même Vallée de l’Oued N’Fiss, du haut en bas de la route du Tizi-n-Test, ainsi que de ses affluents les Asifs Ogdemt (Ougderm) et Agoundis. Encore plus au nord-est, à l’est d’Asni, les entomologistes des belles années (1960-1980) la recueillaient aux alentours de la Maison forestière d’Efkhane, près de Tadmamte. La plus grande partie de ces stations a disparu par éradication de la Coronille-hôte, laquelle s’accommode très mal des indices de désertification de toute cette région où seuls les habitats en replis de ravins conservent encore et partiellement leurs cortèges lépidoptériques, du moins à la faveur des années les plus humides
Z. alluaudi jessima Rungs, 1972
L. t. : Telouet, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : encore abondante au sein des restes du vieux périmètre de reboisement de la thuriféraie calcicole sur la route de Telouet, mais menacée en la partie orientale, justement non loin de la Maison forestière des lieux, où l’irruption illégale et récurrente des troupeaux depuis plusieurs décades est en train d’anéantir ce paradis des Zygènes qui renfermait non moins de six espèces, dont plusieurs subendémiques.
Z. alluaudi scotoesthes Dujardin, 1973
L. t. : Cirque de Jaffar, Haut Atlas nord-oriental.
Synonyme : ayachica Wiegel, 1973 (Djebel Ayachi, Haut Atlas nord-oriental).
Distribution et dynamique : il est difficile d’accepter la synonymie souvent suggérée de scotoesthes avec jessima tant la première illustre idéalement un grade intermédiaire dans l’évolution clinale entre la forme nominative d’aspect assez fluet et la « grosse » jessima qui lui succède bien plus à l’ouest. Scotoesthes pullulait en Haute-Moulouya avant que le pastoralisme délinquant ne vienne à bout de l’entièreté du Djebel Ayachi et de ses si nombreuses stations zygénophiles. Plus à l’ouest, on la retrouve ça et là mais « en sursis », tant dans les vallées encaissées des Oueds Tazarine, Tarbaf et Goualzi, ainsi que dans bien des Asifs du Haut-Ziz, puis aux alentours d’Imilchil, non loin du Lac Tislit où je l’ai perdue de vue ces dernières saisons dans la poussière des troupeaux. Très à l’ouest, l’isolat du Tizi-n-Ifar n’existe plus suite à la mise à sac pastorale des lieux. Je ne l’ai pas noté de la belle région du Djebel Mourik où elle devrait exister. Plus au sud, on la surprend encore aux confins de 3 000 m dans le Haut-Dadès, comme aux Tizi-n-Ouano et au Tizi-n-Ouguern-Zegzaoune, notamment lors des années bien arrosées. Les « alluaudi » du piémont septentrional de la Cordillère du M’Goun correspondent parfaitement à l’identité de scotoesthes mais s’avèrent toujours très rares, même en des localités de relative bonne conservation et où Coronilla minima abonde : Asif Taghia dans le Haut-Ahansal, Tizi-n-Tamda, Azib-n-Ikkis (en montant à l’Ighil-n-Igoudamen).
Z. alluaudi alluaudi Oberthür, 1922
L. t. : Bou-Anguer, Moyen Atlas central.
Distribution et dynamique : la sous-espèce nominative habite le Moyen Atlas tabulaire jusqu’au Col du Zad au sud. La limite de la géonémie orientale de l’espèce se situe dans la région de Boulemane et Z. alluaudi n’occupe donc pas le Moyen Atlas plissé. C’est la sous-espèce qui « en a pris le plus dans l’aile » dès les prémices du développement des nouvelles destinations récréatives de la bourgeoisie citadine marocaine. C’est ainsi qu’elle a pris la tangente d’Ifrane, devenue pathétiquement « capitale écologique » du Maroc concomitamment avec la mise à sac des espaces naturels alentours. Z. alluaudi y volait presque en ville, sur le causse et dans le val jusqu’en 2000. Dorénavant, on ne l’observe plus qu’au Tizi-n-Tretten et au Mischliffen. Pour une cause inconnue, elle a disparu, avec ses congénères, des environs de la Maison forestière de Tihrboula auparavant si riches. On peut encore la rencontrer dans le dédale des beaux restes du secteur de Bekrite (Djebel Ayane) et du Col du Zad (notamment Inifife) où elle se raréfie à vitesse grand V sous les assauts d’une pression plus écocidaire que pastorale.
Z. alluaudi inula Reiss, 1944
L. t. : Bab-Taza, Rif occidental.
Distribution et dynamique : étroitement localisée aux secteurs les plus riches en Coronilla minima des Djebel Tisouka et Lakraa où elle vole par myriades de 1 500 jusqu’à 2 000 m. Aussi au Djebel Tassaot. Les populations sont stationnaires.
Phénologie de l’espèce :
Les adultes de la ssp. nominative du Moyen Atlas sont très précoces (début mai) ; sur les hauteurs de Chefchaouen, les imagos de la ssp. inula perdurent en vol de mai à juillet ; fin mai-début juin volent les ssp. scotoesthes et jessima ; la ssp. lamprotes du Tizi-n-Test ne possède curieusement qu’une génération « automnale » de fin septembre à mi-octobre.
Diagnostic : perte estimée à 50 % de sa population globale (endémique marocain). Gravement menacée et en danger critique dans le Moyen Atlas et le Haut Atlas nord-oriental, vulnérable, voire au mieux de préoccupation mineure ailleurs. De conservation satisfaisante seulement dans le Rif.
Zygaena (A.) algira Boisduval, 1834
Maroc, Algérie, Tunisie.
Plantes-hôtes : Coronilla valentina glauca, C. coronata, C. juncea, C. minima (Fabaceae).
Par le jeu de ses influences écoclimatiques (saharienne, atlantique et méditerranéenne), le territoire marocain est connu pour offrir, de plaines en reliefs, une mosaïque d’écosystèmes très contrastés, plus ou moins imbriqués, dont les biocénoses se ressentent. C’est ainsi que pour les Zygènes, entités éminemment polymorphes et dont la valence écologique montre une grande amplitude, il existe un mode évident de variations graduelles de type clinal. Cela induit, du nord au sud, une graduation de l’habitus qui va progressivement des registres assombris à des palettes plus vives, ces dernières caractérisées par une prééminence du rouge. Un cline est un ensemble de gradients de fréquences allétiques (teinte, graphisme, taille) qu’accuse une espèce sur l’ensemble de son aire. Les Zygènes du Nord marocain, contrée dont l’élévation hygrométrique est mélanigène, sont pour la plupart caractérisées par un chromatisme situé dans le champ d’un bleu peu lumineux, voire de noir bleuté, assez peu gagné de rouge. Ces régions sont celles de la Péninsule tingitane et des montagnes rifaines (notamment occidentales et centrales), du Plateau central et du Moyen Atlas de la région Azrou-Ifrane. À l’opposé, le Sud marocain livre des populations avec une nette prééminence de couleurs plus chaudes, dans les teintes rouges et orangées. Cette gamme claire et plus ardente se manifeste dès les versants méridionaux semi-arides des Moyen et Haut Atlas, en façade saharienne, ainsi que dans les Anti-Atlas où le climat est doté d’une faible pluviométrie durant une courte saison froide et d’une sécheresse presque totale durant une longue saison chaude. Comme en toutes choses de la Nature, il existe des exceptions !
Cette règle touche toutes les espèces, leurs sous-espèces et leurs races locales, mais il en est une que l’on peut considérer comme un vrai cas d’école pour qui veut étudier les variations de l’habitus sur un mode graduel : c’est Zygaena algira. Elle habite quasiment tout l’Ouest de l’Afrique berbérique, du Grand Sud aux marges méditerranéennes et sa grande permissivité d’adaptation fait qu’on la rencontre en tous types de biotopes, pourvu que soit présente l’une des Coronilles-hôtes. Les populations nordiques sont illustrées par les ssp. oreodoxa Marten, 1944, des sapinières clairiérées du Rif et ifranica Hofmann et Reiss, 1981, des lisières des cédraies médio-atlasiques aux pics climatiques perhumides, avec localement 2 000 mm de précipitations. Les sous-espèces suivantes, déjà influencées par le semi-aride, sont celles plus claires de la façade désertique du Moyen Atlas : antoniettae Slaby, 1976, de l’Atlas Tellien, kebirica Reiss, 1944, des hauteurs de Missour et comitabeatrix Dujardin, 1974, des montagnes xérothermiques de Boulemane. C’est ensuite dans le Haut Atlas que la lignée offre des sous-espèces à couleur de fond très rouge, avec d’est en ouest : oufraoutica Hofmann et Reiss, 1981, telealgira Dujardin, 1973, selenion Dujardin, 1973, et chorista Dujardin, 1973. Enfin, c’est aux limites géonémiques présahariennes du Genre Zygaena qu’intervient leucopoda Dujardin, 1973, de très faible taille et au pattern tout à fait représentatif dans le registre des coloris chauds (noir éteint, macules d’un rouge très rosé et toujours largement ceintes de blanc). Elle est surtout connue de l’Anti-Atlas sud-occidental, d’où elle fut décrite (région de Tafraoute, du Djebel Lekst et du Col du Kerdous) et où elle est omniprésente dès la fin de l’hiver. Mais elle possède aussi des localisations plus étroites et moins connues dans le piémont méridional du Djebel Siroua, non loin de Taliouine, dans l’Anti-Atlas nord-oriental. C’est à peine plus au nord-ouest, dès les prémices du Haut Atlas méridional, qu’elle laisse brusquement la place à la ssp. chorista du Tizi-n-Test, d’une livrée distincte. C’est le seul cas de succession chaotique et comme l’occurrence d’un « chaînon manquant » n’est pas envisageable, leucopoda peut ainsi être considérée sur le fil de la spéciation.
Z. algira leucopoda Dujardin, 1973
Locus typicus : Col du Kerdous, Anti-Atlas sud-occidental.
Synonyme : bornefeldii Burgeff & Reiss, 1973 (Col du Kerdous, Anti-Atlas sud-occidental).
Distribution et dynamique : habite une grande partie des reliefs intérieurs de l’Anti-Atlas sud-occidental, là où pousse sa Coronille : Djebel Lekst et versant occidental du Col du Kerdouss où son statut conservatoire est excellent. L’isolat un peu inattendu que j’avais découvert dans l’Anti-Atlas nord-oriental, au-dessus de Taliouine, sur le versant méridional du Siroua, a été éradiqué par la consommation de la plante-hôte dont il n’existait plus que quelques pieds. Il serait possible de retrouver leucopoda ailleurs dans le Siroua, comme non loin d’Askaou (et non Askaoun !) où Coronilla valentina possède quelques implantations.
Z. algira chorista Dujardin, 1973
L. t. : Tizi-n-Test, versant Sud, km 148, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : depuis toujours hyper abondante à mi-versant Sud du Tizi-n-Test, depuis Tacheguelte jusqu’à Targa-n-Izrane, notamment aux alentours de Chafarni et dans les vastes pineraies de reboisement de l’Adrar-n-Anal où la Coronille à tige de Jonc peuple toutes les trouées du sous-bois de la forêt clairiérée. Ce n’est que depuis ces toutes dernières années qu’elle est victime de recul, suite à l’abandon du judicieux périmètre de protection dont bénéficiait tout ce secteur. Le parcours devenu incessant malmène les pans, pourtant puissants, de Coronilles et massacre toute la chaméropaie. C’est très dommage. Il en existe une colonie au Tizi-n-Oulaoune, entre Ijoukak et Ouadouz, sur la piste qui rejoint Aoulouz.
Z. algira selenion Dujardin, 1973
L. t. : Tizi-n-Test, versant Nord, km 121, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : cette race locale de la première (ou inversement !) intervient sur l’autre versant du même Tizi-n-Test, nettement plus froid puisque sous l’influence du Toubkal et de son manteau nival qui perdure jusqu’à l’été. On rencontre selenion chaque fois que pousse Coronilla juncea, par places depuis Aghbar jusqu’à Ijoukak, et même plus loin vers Asni, et notamment à Iguer et à Idni. Elle est aussi présente dans la Vallée de l’Ogdemt.
Z. algira telealgira Dujardin, 1973
L. t. : Telouet, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : dès le début de mai, sa présence est pionnière du cortège local. La colonie est stable mais assez diluée au sein des autres espèces de Zygènes qui peuplent l’habitat « zygènifère » de la thuriféraie dégradée et du reboisement attenant à l’ouest de Telouet.
Z. algira ifranica Hofmann & Reiss, 1981
L. t. : Ifrane, Moyen Atlas central.
Distribution et dynamique : cette superbe sous-espèce a vu son statut passer de Charybde en Scylla en un temps record, soit des années 2000 à nos jours. Je l’ai connue volant en nuées non loin de la Maison forestière d’Ousmaa, sur l’itinéraire Tioumliline – Tagounit qui longe en corniche l’escarpement d’Azrou, là où Coronilla valentina est parsemée en lisière de la chênaie verte. Les troupeaux qui se régalent de la Légumineuse sont évidemment la cause de l’effondrement de la Zygène dont il est maintenant très difficile de surprendre une larve sur la plante-hôte ou un imago butinant une Scabieuse. Je ne l’ai jamais surprise au Val d’Ifrane où, du temps encore béni où les lieux n’étaient pas transformés en espaces récréatifs, je surveillais en vain les alentours des rares pieds de Coronille non loin de la Cascade des Vierges. C’était ici la localité typique et mythique tant de Z. algira ifranica que de Z. elodia elodia. Il m’est arrivé de prélever ifranica dans un secteur des prairies sylvatiques du Tizi-n-Tretten, mais à raison d’un seul spécimen au repos. Je « ratisse » ce site plusieurs fois chaque saison depuis des lustres et n’ai pu mettre la main sur un second imago, ni découvrir la station de Coronille qui s’y tient inévitablement.
Z. algira ksibaica Barragué, 1986
L. t. : El-Ksiba, Moyen Atlas sud-occidental.
Distribution et dynamique : je n’ai jamais vu cette sous-espèce, estimée comme synonyme d’ifranica par nos collègues « réunisseurs ». Bien que très éparse, Coronilla valentina glauca est toujours en place au sein du maquis pluristratifié de l’arbouseraie, dans le secteur de son locus typicus, non loin du Tizi-n-Aït-Ouirra, au sud d’El-Ksiba, tout comme dans le Djebel Tazerkount, au-dessus d’Afourer, à l’ouest de Beni-Mellal.
Z. algira oufraouica Hofmann & Reiss, 1981
L. t. : Tizi-n-Oufraou, Haut Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : in memoriam ! N’existe plus depuis l’anéantissement de cet autre site auparavant si riche en flore et en Lépidoptères qu’était le Tizi-n-Oufraou, sur la piste de Jaffar. J’ai pu revoir voler oufraouica il y a deux ans, sous la forme compensatoire de quelques sujets sur des pieds de Coronille miraculeusement oubliés par les troupeaux un peu à l’ouest de la Maison forestière de Mitkane.
Z. algira kebirica Reiss, 1944
L. t. : Ksar-El-Kebir, Moyen Atlas nord-oriental.
Race locale (natio) ou synonyme : comitabeatrix Dujardin, 1974 (Boulemane, Moyen Atlas central).
Distribution et dynamique : je ne connais cette sous-espèce steppique propre au mésoméditerranéen semi-aride que des basses montagnes situées au nord de Missour. Constante et surabondante. Elle existe peut-être toujours plus haut dans la Vallée de l’Oued Soufouloud, près de Ksar-El-Kebir, où mes recherches sont déficitaires, faute d’accès.
Z. algira antoniettae Slaby, 1976
L. t. : Terni Ben Hadiel, Monts de Tlemcen (Algérie).
Au Maroc : Col de Jerada, Atlas Tellien.
Distribution et dynamique : la colonie du Col de Jerada est éteinte en raison de l’éradication de sa source trophique. Je connaissais un habitat de fortune, au nord d’El-Aïoun, mais il a été biffé. Jusqu’à preuve du contraire, Z. algira antoniettae n’existe plus au Maroc.
Z. algira oreodoxa Marten, 1944
L. t. : Djebel Tisouka, Rif occidental.
Synonymes :
tigrina Marten, 1944 (Djebel Meggou, Rif occidental) ;
germainae Dujardin, 1973 (Melaab, Rif occidental).
Distribution et dynamique : au bord de l’extinction entre 1990 et 2009, auparavant estimée comme rarissime par les zygénologues les plus compétents, nous devons sa résurection à la promulgation du Parc de Talassemtane qui enveloppe tous les hauts reliefs des alentours de Chefchaouen dans l’objectif de la préservation du Sapin du Rif (Abies maroccana). C’est pour l’instant l’un des parcs les mieux respectés, y compris par la population locale, Berbères peut-être plus en phase que les autres avec la Nature sauvage. La colonie installée dans le grand barranco d’origine glaciaire du versant Sud du Djebel Tisouka fait preuve chaque année d’une meilleure remontée biologique. Une autre population de moindre densité existe sur la montée au Djebel Lakraa depuis Bab-Taza, Cette dernière localisation souffre épisodiquement de l’illusoire toilettage forestier trop prononcé (nettoyage jusqu’à la roche-mère !) du coupe-feu en lisière duquel elle a la malchance de se situer.
Phénologie de l’espèce :
Les adultes de la ssp. leucopoda peuvent être actifs dès février lors d’années précoces et volent nombreux tout le mois de mars, voire avril ; chorista du versant méridional du Tizi-n-Test émerge dès mars, tandis que selenion du versant septentrional et directement exposé aux neiges du Mont Toubkal ne vole pas avant la mi-mai. Les autres sous-espèces du semi-aride volent dans le courant de mai. Il faut attendre les premiers jours de juin pour observer les imagos de la sous-espèce forestière ifranica du Moyen Atlas froid et mi-juin pour ceux d’oreodoxa du Rif humide. Ce qui donne un calendrier de vol étalé sur cinq mois du sud au nord !
Diagnostic : perte estimée à 50 % de sa population au Maroc. De conservation satisfaisante dans l’arganeraie de montagne de l’Anti-Atlas sud-occidental (où l’activité pastorale est aléatoire) ; éteinte dans l’Anti-Atlas nord-oriental où l’espèce avait déjà périclité il y a fort longtemps ; en danger critique sur le versant Sud du Haut Atlas sud-occidental, dans le Haut Atlas nord-oriental (Ayachi, Imilchil) et dans tout le Moyen Atlas ; de préoccupation mineure et même tout récemment en embellie dans le Rif occidental où elle bénéficie d’une aire de protection effective. L’état des lieux offre un bilan pour le moins chaotique pour Z. algira en territoire marocain.
Zygaena (A.) elodia Powell, 1934
Maroc.
Plante-hôte : Coronilla valentina glauca (Fabaceae).
Z. elodia elodia Powell, 1934
Locus typicus : Ifrane, Moyen Atlas central
Distribution et dynamique : parfois considérée comme affine à Z. fausta (Linnaeus, 1767), Z. elodia fut découverte par Harold POWELL, pharmacien à Ifrane, au temps du Protectorat. La forme nominative avait déjà disparu lors de mes premières missions marocaines dans les années 1990, tout comme Z. algira ifranica dont c’était le co-locus typicus sur Coronilla valentina qui s’y maintient très éparsement.
Z. elodia kalypso Marten, 1944
L. t. : Oued Tiguasas, Rif occidental.
Distribution et dynamique : dans le Rif, c’est une Zygène des campagnes de basse altitude. J’en connais deux colonies très sables et sans trop de fluctuation populationnelle : l’une à El-Had-d’Agadir-El-Krouch, au nord-est de Ouezzane, l’autre à Brikcha, toujours au nord de Ouazzane, dans la région des Beni-Routen. Axel HOFMANN m’a confirmé qu’elle se maintient aussi au Douar Rouida, où Guy BARRAGUÉ l’avait découverte dans les années 1970. Mon aimable collègue Hermann-Josef FALKENHAHN m’en a signalé une quatrième implantation, cette fois au nord de Chefchaouen et donc à l’extérieur des Beni-Routen, au Pont de Dieu, près d’Akchour, site exposé car un peu trop touristique. Je n’ai pas encore pu vérifier le présent état de santé de cette intéressante station.
Phénologie de l’espèce :
Dès la fin du mois de mai, avec une seconde génération plus ou moins accomplie en début d’automne.
Diagnostic : perte estimée à 50 % de sa population globale (pur endémique marocain si on considère elodia comme disjointe de fausta). Éteinte dans le Moyen Atlas, de préoccupation mineure dans le Rif occidental.
Zygaena (A.) orana Duponchel, 1835
Maroc, Algérie, Tunisie, Sardaigne.
Plantes-hôtes : Onobrychis argentea, O. alba et O. peduncularis jahandiezi dans le Sud et le Centre, Astragalus lusitanicus dans le Nord (Fabaceae).
Z. orana desertorum Tarrier & André, 2015
Locus typicus : Igherm, Anti-Atlas sud-occidental
Distribution et dynamique : je ne connais que deux populations présahariennes de Z. orana, mais d’autres existent très probablement. Le travail consiste à fréquenter les planches locales d’Onobrychis, lors de fins d’hivers favorables et jusqu’en mars-avril. L’adulte n’émerge pas lors d’années trop sèches, ou n’est guère repérable en raison d’un effectif minimum. Ma découverte la plus inattendue pour une espèce que l’on ne connaissait que du Moyen Atlas humide et du Pré-Rif et Rif pluvieux fut celle, topotypique, de la route d’Igherm à Tata, non loin du domaine oasien. L’habitat sont les bas de pentes rocheuses de part et d’autre d’un oued sec où se complait, en limite d’aire, Onobrychis peduncularis jahandiezi. Les années sans précipitations, les lieux sont « galvanisés » et le Sainfoin invisible ou grillé. Hors des périodes de diapause prolongée, parade imparable à la survie en un tel milieu, la population est stable et les imagos foisonnent. Je dois à la sagacité de Jean-Marie ANDRÉ la connaissance de l’autre implantation, plus en recul vers l’intérieur et cependant moins dense en effectif, qui existe entre Taliouine et le Tizi-n-Taghatine et où la Zygène se nourrit cette fois d’Onobrychis argentea africana. Aucune vraie pression ne menace orana desertorum.
Z. orana oberthueri Bethune-Baker, 1888
L. t. : Sebdou & Atlas Saharien (Algérie).
Au Maroc : Djebel Siroua, Anti-Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : c’est dans les années 1990 que j’ai pu déceler l’existence des premières Z. orana du Sud-Maroc en zone semi-aride. C’était lors de ma première traversée du Djebel Siroua, un monumental Massif volcanique quasiment attenant au Haut Atlas central et qui, curieusement, n’avait jamais été prospecté par un entomologiste. Conjointement à d’innombrables Rhopalocères, pour la plupart transfuges du Mont Toubkal, et à d’autres plus steppicoles, Z. orana volait en nombre chaque fois qu’intervenait Onobrichys argentea, à de nombreuses reprises entre Taliouine et Anezal, entre 1 800 et 2 500 m d’altitude. Les populations les plus fortes, celles des cols de grande altitude (Tizi-n-Tieta, Tizi-n-Melloul), ont été en partie décimées par la présence devenue quasi sédentaire des troupeaux depuis 2010. Les colonies inférieures du versant occidental, souvent mitoyennes des villages, ont cependant et miraculeusement été préservées.
N.B. : Le recours au taxon oberthueri qui désigne une entité d’Algérie correspond ici à une absurdité totale. Cet isolat anti-atlasique éminemment atlantique ne peut être assimilé à un taxon très éloigné de plus de 1 000 km, dont le locus typicus serait d’Oranie ou des Aurès selon la description originale. Le critère géographique de l’isolement vaut à lui seul une validation. Toute insularité terrestre induit un manque de flux génétique et concourt à façonner un nouvel être d’ordre au moins racial ou subspécifique (même si les différences morphologiques ne sautent pas aux yeux du premier examinateur venu), a fortiori quand cette insularité résulte de grandes barrières écogéographiques dressées par les reliefs sur une forte distance. Pour remédier à cette incongruité qui ne fut pas mienne, je proposerai dans une note ultérieure un nom de remplacement pour désigner les nombreuses « oberthueri » du Maroc qui figurent dans bien des collections.
Z. orana tirhboulensis Hofmann & Reiss, 1982
L. t. : Boulemane, Moyen Atlas central.
Race locale (natio) ou synonyme : hajebensis Reiss & Tremewan, 1960 (El-Habeb, Moyen Atlas central).
Distribution et dynamique : d’un saupoudrage de dizaines de colonies ayant peuplé bien des sites du Moyen Atlas central, depuis El-Hajeb et Imouzzèr-Kandar jusqu’à Aïn-Leuh et Boulemane (localité typique), y compris celles d’Ito et d’Ifrane, il ne reste que bien peu de dèmes non éteints par la faute des infrastructures du développement et du surpâturage réunis. Il s’agit surtout de la population du Tizi-Oughmart, dans le secteur d’Ougmas entre Azrou et Ifrane, voire de celles de quelques zones sommitales des collines surplombant la R7201 entre Azrou et Adarouch. Mais Z. orana s’y trouve de plus en plus cernée par les troupeaux.
Z. orana contristans Oberthür, 1922
L. t. : Mrassine, Djebel Zerhoun, Pré-Rif.
Distribution et dynamique : devenue de rencontre accidentelle dans la région d’Oulmès, suite à un déclin local de l’Onybrichis pour une raison non identifiée, la forte population du Djebel Zerhoun, en Forêt de Bab-Rmila, reste en place sur Astragalus lusitanicus. Mais la Zygène y est chaque fois davantage repoussée dans ses retranchements par telle ou telle pression agricole induisant un défrichage drastique des zones confuses du bas maquis où elle se tient. Quelques isolats plus au nord n’ont pas été suivis. Il s’agit de petits peuplements au nord de Taza dans les environs d’Aknoul et de Taineste.
Z. orana tatla Reiss, 1943
L. t. : Tétouan, Rif occidental.
Distribution et dynamique : donnée de Cabo Negro au niveau littoral de Tétouan, j’ai eu la bonne fortune de retrouver cette sous-espèce qui faisait couler beaucoup d’encre depuis plus d’un demi-siècle. « Ma » population se situe au niveau inférieur du Djebel Ben-Karriche, site excessivement nuageux et pluvieux pour la région, qui domine immédiatement la trépidante ville de Tétouan au sud-est. La colonie ne souffre d’aucune nuisance, même pas celle des chèvres qui pourtant parcourent trop souvent l’inextricable couverture végétale ligneuse. Elle connaît néanmoins de fortes fluctuations phénologiques, entre mi-mars et mi-mai, conséquence des turbulences météorologiques de la zone. Z. orana tatla n’exploite qu’un secteur partiel de l’immense peuplement d’Astragalus baeticus qui se complait dans ce maquis haut et épais du type matorral. Le secteur d’où émergent les adultes ne semble jamais le même au fil des années de mon fidèle suivi, ni de bas en haut, ni d’est en ouest ! C’est à la limite de la falaise supérieure, très en lisière de la pinède, que volent les imagos depuis ces dernières années, alors que dans les années 1990 je les observais sur les Astragales du bord de route dorénavant désertées !
Phénologie de l’espèce :
Partout assez précoce, depuis la seconde semaine de mars pour les populations présahariennes (Igherm, Ighri) jusqu’à mi-avril et début mai plus haut dans le Djebel Siroua ; fin avril à début mai partout ailleurs dans le Centre et le Nord, Une seconde génération de fin d’été peut se manifester dans le Nord (Zerhoun et Rif). L’apparition de la ssp. présaharienne desertorum est sporadique et aucun imago n’émerge suite à des hivers trop secs induisant une somnolence du Sainfoin nourricier avec la croissance duquel doit coïncider la naissance des adultes dont c’est aussi la source nectarifère. Cela sous-entend une adaptation sur le mode d’une diapause prolongée d’au moins deux à trois années de suite. Cette diapause se fait au stade de l’état larvaire, la chenille se montrant d’une résistance à toute épreuve (J.-M. ANDRÉ, comm. pers., 27 novembre 2017). Même observation pour les colonies plus altimontaines de la ssp. dite oberthueri du Djebel Siroua, montagnes pouvant subir une ou plusieurs années de sècheresse drastique.
Diagnostic : perte estimée à 50 % de sa population au Maroc. De conservation satisfaisante dans le Sud et le Rif, l’espèce est en forte régression dans tout le Moyen Atlas où ses niches sont gravement affectées. De nombreux dèmes ont été exterminés depuis les années 2000.
Sous-genre Zygaena Fabricius, 1775
Zygaena (Zygaena) nevadensis Rambur, 1858
Maroc, Portugal, Espagne, France, Grèce, Macédoine, Roumanie, Bulgarie, Nord du Caucase.
Plante-hôte au Maroc : Vicia tenuifolia (Fabaceae).
Z. nevadensis atlantica Le Charles, 1957
Locus typicus : Col de Tamrabta, Moyen Atlas central.
Distribution et dynamique : portée disparue depuis sa découverte en 1858, voire donnée de présence douteuse sur le Continent africain par quelques fins spécialistes, je ne l’ai pas retrouvée près d’Ifrane d’où elle fut décrite mais nettement plus au sud, non loin d’Itzer, où elle habite la partie la plus profonde et ancienne de la cédraie mixte. Jusqu’en 2000, elle s’y montrait abondante jusqu’au jour où ce biotope très à l’écart et interdit au sylvopastoralisme a finalement été ouvert et livré au saccage. Aux affres du parcours des bergers, ce sont ajoutés les violents méfaits de travaux forestiers de débardage dans l’immense barranco où pousse justement la Vesce-hôte et vit la Zygène subfossile, avec, tel un malus, la fabrication de charbon de bois sur place durant plusieurs années. C’et un miracle si nevadensis n’est pas partie en fumée ! Oui, à l’heure où le discours politique nous rebat les oreilles du refrain cosmétique « biodiversité », c’est ainsi qu’est géré la pérennité du seul site africain où survit une telle merveille entomologique ! Parce que j’avais quand même pas mal agi auprès des décideurs locaux et nationaux pour que ce secteur puisse bénéficier d’une protection. Peine perdue ! Pourtant, l’interdiction de fouler une surface si modeste ne pouvait, en aucun cas, menacer l’économie locale. Eh bien il faut croire que oui ! Ou bien qu’une Zygène, pas mieux considérée par les décideurs qu’une Mouche à m…, ne puisse être prise en considération ! À ce jour, la Zygène est de justesse rescapée. Je suis parti d’une observation par cent, tombée à zéro, puis remontée progressivement à quelques sujets, puis maintenant à quelques dizaines établis sur de rares pieds de Vesces bénéficiant de la protection temporaire de branchages. On est bien loin des massifs entiers d’antan ! Qu’en sera-t-il demain ? J’ajoute que je viens de noter l’existence de Z. nevadensis dans le Rif central, dans le Mont Tidiquin, et presque aux risques de ma vie (…).
Phénologie de l’espèce :
Les premiers imagos volent entre la fin avril et la mi-mai selon les années, en dépit d’un biotope très froid et encaissé. Leur émergence est concomitante avec la floraison de la plante-hôte, seule butinée.
Diagnostic : perte estimée à 75 % de sa population au Maroc (subendémique). Z. nevadensis atlantica fut portée disparue peu après sa découverte et durant un demi-siècle au Maroc où son existence fut même contestée. Le seul peuplement retrouvé en mai 1998, jouissant alors d’une bonne dynamique, est désormais gravement malmené dans un espace écocidé ne bénéficiant que d’une figure de protection fictive et aléatoire. De fragiles indices d’une seconde présence maghrébine dans le Rif viennent d’être relevés. Ce subendémique unique pour le Continent africain exige les plus urgentes mesures de gestion conservatoire si on veut, au nom de la biodiversité, en pérenniser l’existence.
Z. (Z.) persephone Zerny, 1934
Maroc.
Plante-hôte : Vicia glauca rerayensis (Fabaceae).
Z. persephone persephone Zerny, 1934
Locus typicus : Tizi-n-Tacheddirt, Haut Atlas central, 3 100 m.
Distribution et dynamique : l’espèce est portée disparue depuis la moitié des années 1970 et la ssp. nominative n’a jamais été revue, ni au Tizi-n-Tacheddirt, ni ailleurs où pousse aussi sa Vesce-hôte. Les perturbations pastorales engendrées sur les lieux sont à prendre en considération mais ne sont pas suffisantes pour expliquer cette disparition. La Vesce concernée n’a pas été éradiquée par les Ovins et pousse encore à la faveur protectrice des xérophytes épineux récalcitrants. Nombreux sont les collègues ayant répété en vain les missions sur place, y compris et avec toute sa science, notre ami Axel HOFMANN, lequel fut l’un des derniers collecteurs de l’animal en 1978, si je ne m’abuse.
Z. persephone mgouna Rungs, 1967
L. t. : Tizi-n-Aït-Bou-Oulli, Haut Atlas central, 3 150 m.
Distribution et dynamique : jamais signalée après sa découverte par Charles RUNGS en 1967, que ce soit en sa localité typique ou ailleurs dans le M’Goun. Mais il est vrai que l’accès est ici nettement plus difficile que dans le Toubkal où Tacheddirt figure dans la liste des pèlerinages coutumiers. Z. persephone pourrait aussi être rencontrée dans le Haut Atlas nord-oriental, notamment aux confins des crêtes de l’Ayachi où une sous-espèce de Vicia glauca pousse dans la xérophytaie.
Phénologie de l’espèce :
Mi-juillet. Il est bien possible que cette phénologie soit désormais avancée, comme elle l’est pour pas mal d’espèces depuis le réchauffement climatique, particulièrement prégnant au Maroc.
Diagnostic : perte estimée à 100 % de sa population globale tributaire de la steppe froide à coussins épineux du Haut Atlas altimontain (endémique marocain). Espèce éteinte ou du moins jamais retrouvée depuis les deux dernières décennies du 20ème siècle.
Z. (Z.) lavandulae (Esper, 1783)
Maroc, Portugal, Espagne, France, Italie.
Plante-hôte (au Maroc) : Coronilla valentina glauca (Fabaceae).
Z. lavandulae michaellae Rungs & Le Charles, 1943
Locus typicus : Col de Tamrabta, Moyen Atlas central.
Distribution et dynamique : c’est un peu par hasard qu’il y a quelques années j’ai retrouvé Z. lavandulae michaellae non loin de la Maison forestière de Takeltount, au sud de Sefrou. Il s’agissait d’une récolte de passage, en fin de journée et, quand j’y suis retourné l’année suivante, je n’ai pu revoir la Zygène.
Z. lavandulae izilanica Reiss, 1944
L. t. : Izilane, Rif occidental.
Distribution et dynamique : j’ai déjà signalé, au chapitre de Z. algira oreodoxa, la nouvelle embellie des montagnes de Chefchaouen et le regain d’espèces que je croyais perdues, et ce, depuis la promulgation du Parc de Talassemtane et la fermeture aux troupeaux de bien des secteurs d’intérêt floristique. C’est sans nul doute ce qui m’a permis, en 2009, de mettre la main sur cette Zygène qui fut tant recherchée mais jamais revue depuis 1944 ! Je ne la connais que d’un site forestier très discret de la sapinière calcicole du Djebel Tisouka, au-dessus de Chefchaouen, où elle vole à profusion, mais seulement durant quelques jours, au-dessus du matorral et de la chênaie verte, ainsi que dans quelques trouées florifères. En dépit de recherches forcenées, je ne l’ai pas décelée sur le versant d’Izilane. Je fréquentais déjà le site bien avant de l’apercevoir en 2009, alors que des hordes de chèvres y faisaient pas mal de ravages. Le récent regain prouve qu’elle s’y maintenait en effectif très bas, même si non repérable par l’entomologiste de passage. Ce qui pourrait être un peu rassurant dans le cadre de mes autres alertes… Mais ce maintien inattendu de Z. lavandulae izilanica est aussi à attribuer à un insecte dont le cadre de vie est celui d’un écosystème humide, riche et touffu, moins dégradable par la pression sylvopastorale qu’un système de la steppe aride, par exemple.
Phénologie de l’espèce :
De la dernière semaine de mai jusqu’à la mi-juin, avec un bref acmé démographique. Cette courte apogée opportuniste coïncide avec la floraison des boutons d’Anthyllis polycephala, source nectarifère locale et élective de cette Zygène très floricole, voire autre plante-hôte supputée.
Diagnostic : perte estimée à 50 % de sa population marocaine. Z. lavandulae est portée disparue du Moyen Atlas,. La colonie du Rif occidental bénéficie depuis peu d’un regain certain en vertu d’un périmètre de protection respecté jusqu’à ce jour. Globalement, l’existence marocaine de Z. lavandulae reste préoccupante et doit être considérée en danger critique.
Z. (Z.) trifolii (Esper, 1783)
Maroc, Algérie, Tunisie, Portugal, Espagne, Andorre, France, Italie, Angleterre, Pays de Galle, Belgique, Pays-Bas, Danemark, Allemagne, Suisse, Autriche, Pologne, Tchéquie, Ukraine.
Plantes-hôtes : Lotus spp, au Maroc surtout Lotus corniculatus (Fabaceae).
Z. trifolii tizeragis Wiegel, 1965
Locus typicus : Djebel Oukaïmeden, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : partout fréquente dans le secteur de l’Oukaïmeden, pourvu que son Lotier soit en place, ce qui est presque toujours le cas en bordure des ruisseaux et des torrents, ainsi que dans les mouillères, les tourbières et toutes zones fontinales.
Z. trifolii tizina Wiegel, 1973
L. t. : Tizi-n-Tichka, Haut Atlas central.
Distribution et dynamique : présente mais sans abondance dans les prairies mouillées du plateau du Tichka et sur les berges des ruisseaux. Elle est nettement plus abondante à l’est, dans la Cordillère du M’Goun, notamment en sa partie occidentale où elle possède de nombreuses localisations : Vallée des Aït-Bou-Guemez, autour d’Arous et dans les pâturages de l’Azib-n-Ikkis où elle vole en essaims ; Haute Vallée de Tassaout, depuis Tighirt jusqu’à la base du Fedhrat. Je l’avais trouvée, fréquente mais très localisée, encore bien plus au sud-ouest, dans les grandes prairies mouillées du Djebel Siroua, aux niveaux des Tizi-n-Melloul et Tieta. C’est ici la limite géonémique méridionale de son aire. Elle ne semble pas s’y maintenir depuis que l’accès aux pâturages est quasiment ouvert en permanence et où le cheptel s’est démultiplié.
Z. trifolii mideltica Reiss & Reiss, 1970
L. t. : Taddamout, Haut Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : Z. trifolii mideltica est communément répandue et stable dans ses implantations, bien que subissant les pressions du cheptel en pacage. Elle reste en place quasiment partout aux alentours immédiat de Midelt, à la faveur du maintien de la moindre formation herbacée humide ou spongieuse, y compris au bord des fossés d’irrigation des parcelles d’arboriculture, en périmètre des luzernières et en marge des pacages non permanents. Elle a disparu des plus hautes stations du Djebel Ayachi, mais vole encore sur les premiers tronçons de la route au Cirque de Jaffar, autour de Berrem (Casbah des Noyers), ainsi qu’à Tattiouine. Son aire est très vaste et s’étend bien au-delà de Midelt, au nord depuis les environs d’Itzer jusqu’à Bekrite, comme dans les prairies détrempées d’Aït-Oufella, d’Aït-Ali et de Senoual (trans ad lachiveri), au sud jusqu’au Haut Ziz des régions d’Er-Rich et d’Imilchil. Sur la P7379 et dans les Vallées des Djebel Iouigharacene et Sloul, elle est permanente au fil des oueds et des asifs (Tirharlyne, Almou-n-Igri, Tardagal, Tilmi) et abonde autour du village d’Anefgou. Sur la R706, au pied du Djebel Aderdouz, on la rencontre ça et là dans les prairies, parfois de surface modeste, des berges des Oueds Igli et Taribannt, et surtout aux abords du douar de Tirhibout. Encore bien plus à l’ouest, elle habite les prairies du Djebel Mourik (trans ad tizina).
Z. trifolii lachiveri Barragué, 1986
L. t. : Ifrane, Moyen Atlas central.
Distribution et dynamique : la disparition de cette sous-espèce peu après sa description demeure un mystère, alors que les rives du Val d’Ifrane étaient encore loin de la moindre perturbation. Nombreux sont les sites régionaux herbacés et hygrophiles très favorables où j’ai supputé cette espèce praticole sans la voir : prairies détrempées de la route de Meknès à Mrirt par la R7201 (Es-Sebt – Adarouch – Akouri-n-Aït-Ouaki – Saba-Saka), prairies humides d’Aït-Haddou, à la sortie d’Azrou en direction d’Ito (N13), marécages du plan d’eau d’Amghass, mouillères et tourbières de Boudra et de la Zaouïa d’Ifrane à l’ouest d’Aïn-Leuh, prairies fraiches et sylvatiques aux alentours des Maisons forestières d’Ouiouane et de Tiberkanine, tous secteurs où pousse le Lotier corniculé.
Z. trifolii diffusemarginata Rothschild, 1933
L. t. : Hauta-El-Kasdir, Rif occidental.
Distribution et dynamique : les stations de cette grande sous-espèce sont nombreuses et stables aux alentours de Chefchaouen, y compris en des lieux peu favorisés par l’humidité, comme à moins de 1 000 m en adret du petit Djebel Kelaa, dans un matorral mitoyen de la pineraie où elle vole en pionnière et en grande densité entre les arbrisseaux et les buissons où la plante devenue sciaphile se développe à l’ombre des ligneux. Plus haut, elle investit de nombreuses stations du Tisouka, sur tous les versants et ressauts, jusqu’à Izilane. On la retrouve dans le Massif du Lakraa depuis l’altitude la plus modeste au Djebel Melaah, y compris dans les pozzines de la suberaie, jusqu’à la partie sommitale (2 055 m) du Lakraa, au-dessus de la sapinière, là où s’infiltrent quelques cèdres où elle se montre très active en juin. C’est dire la forte résilience de cette sous-espèce !
Z. trifolii nigra Rothschild, 1933
L. t. : Ketama, Rif central.
Synonyme : lucida Reiss, 1944 (Ketama, Rif central).
Distribution et dynamique : je connais cette belle sous-espèce de plusieurs sites perhumides mais presque tous en sursis ou anéantis ces derniers temps par le pacage ou le drainage : alentours de Tamesnite dans le Djebel Outka, plusieurs stations au bord des mares ou sur tourbières entre Bab-Taza et Fifi, à l’ouest de Bab-Berred, au pied du Djebel Afechtal et aux alentours de la Maison forestière (site désormais asséché), au-dessus de Tleta-Ketama en accédant au Djebel Tidiquin. Mais ses localisations les plus fécondes se situaient dans les cédraies de la région de Targuist, en terrain marécageux découvert en montant au Djebel Oursane, puis aux alentours Tizi-Tfri, entre 1 600 et 1 800 m, dans les tourbières sylvatiques où la concurrence avec les troupeaux d’Ovins aux parcours sédentaires a été partout fatale à la Zygène qui n’y est plus qu’un souvenir.
Z. trifolii phaea Dujardin, 1974
L. t. : Bab-Bou-Idir, Moyen Atlas nord-oriental.
Distribution et dynamique : sans doute parvenu trop tard (1990) sur ce site notoire du Djebel Tazzeka, je n’ai jamais rencontré cette sous-espèce qui pourrait y maintenir quelques localisations dans la zone.
Phénologie de l’espèce :
Mai-juin, avec une seconde génération partielle en septembre chez la ssp. mideltica.
Diagnostic : perte estimée à 25 % de sa population au Maroc. Tributaire des zones humides dont l’assèchement s’accélère (élevage, surpompage agricole, érosion), l’espèce est encore et momentanément bien représentée, du point de vue cartographique comme en état de profusion locale. Mais en raison de l’avenir incertain du type d’habitat humide dont elle est tributaire, Z. trifolii est notée en danger.
Remerciements
Mes plus amicaux remerciements vont à Jean-Marie ANDRÉ (Caumont-sur-Durance, France) qui m’a bien souvent accompagné sur les sites pour la réalisation de ses talentueuses photos, et encore merci à lui pour la magnifique conception des planches.
Ma compagne Frédérique COURTIN-TARRIER est intimement associée à ce travail par la réalisation des cartes de répartitions, par ses observations personnelles sur le terrain et, ce qui n’est pas le moindre, par son endurance au volant, au fil des longs rubans d’asphalte et à l’assaut des djebels “off road”.
Je suis redevable à Luc MANIL, Président de l’Association des Lépidoptéristes de France (ALF), ainsi qu’à mes collègues du comité de rédaction, notamment à Jean-Marc GAYMAN pour la mise en forme “on line”, à Xavier MÉRIT pour sa relecture et à Laurent VOISIN pour son parrainage au sein de ma « nouvelle famille » éditoriale.
Toute ma reconnaissance va a mes collègues et ami(es) : Jean DELACRE (Les Bons-Villers, Belgique), Jacques DEMANGE (Saint-Denis-en-Val, Loiret, France), Christian DOLLÉ (Strasbourg, France), Hermann-Josef FALKENHAHN (Ebsdorfergrund, Allemagne), Axel HOFMANN (Breisach-Hochstetten, Allemagne), Simon HORNSTEIN (Reutlingen, Allemagne), Lucie RAZAFIMANANTSOA (Strasbourg, France) et Jean-Claude WEISS (Metz, France) pour leurs collaborations et soutiens respectifs à mon travail de terrain. Merci à mon ami Christian DOLLÉ qui a bien voulu relire et corriger mon tapuscrit.
Mon souvenir ému est empreint de la mémoire de Francis DUJARDIN (1910-1984), éminent Zygénologue et entomologiste d’autorité mondiale, qui, lors de longues conversations à son domicile niçois, avait su orienter ma jeune passion entomologique loin du seul désir de la collectionnite aiguë et m’inciter à une vision non dogmatique de la taxinomie.
Enfin, ma vive gratitude s’adresse au Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte contre la Désertification du Maroc, notamment à Monsieur le Haut Commissaire le Dr Abdeladim LHAFI, à Monsieur Mohammed BADRAOUI et à Monsieur Mohammed ENDICHI, Directeurs successifs de la Lutte contre la Désertification et de la Protection de la Nature, ainsi qu’à Monsieur Mohammed RIBI et à Monsieur Zouhair AMHAOUCH, chefs successifs de la Division des Parcs et Réserves Naturelles, pour les permis accordés.
Références bibliographiques
Demange (Jacques) et Tarrier (Michel R[aymond]), 1999 – Redécouverte au Maroc de Zygaena nevadensis Rambur, 1858 (Lepidoptera : Zygaenidae). Linneana belgica, 17 (3) : 111-116, 1 pl. coul., 1 carte de répartition.
Hofmann (Axel) et Tremewan (Walter Gerald), 1996. – A Systematic Catalogue of the Zygaeninae (Lepidoptera: Zygaenidae), 1-251, Harley Books, Colchester, Essex, England.
Rungs (Charles Ernest E.) et Le Charles (Louis Gabriel), 1943. — Contribution à l’étude des Zygènes du Maroc (Lepidoptera). Bulletin de la Société entomologique de France, [(2)], 48 (3) : 47.
Tarrier (Michel R[aymond]), 2001. – Les Zygènes de l’Anti-Atlas marocain : découvertes, inventaire commenté et bio-indication (Heterocera, Zygaenidae, Zygaeninae). Bulletin de la Société entomologique de France,106 (2) : 163-172, 16 illustr. photogr. coul., 4 cartes.
Tarrier (Michel R[aymond]), 2001. – Redécouverte de Zygaena orana tatla Reiss, 1943 (Lepidoptera : Zygaeninae). Linneana belgica 18 (4) : 171-174, 6 illustr. photogr. couleur.
Tarrier (Michel R[aymond]), 2002. – Sept cents derniers jours de lépidoptérologie au Maroc (Lepidoptera Papilionoidea et Zygaenidae Zygaeninae). Alexanor 21 (6) 2000 : 325-414, 96 illustr. photogr. coul., 8 cartes.
Tarrier (Michel R[aymond]), 2011. – Le Maroc revisité (première partie) (Lepidoptera Papilionoidea et Zygaenidae Zygaeninae). Alexanor, 24 (3), 2009 : 165-199, 18 illustr. photogr. coul.
Tarrier (Michel R[aymond]), 2012. – Le Maroc revisité (deuxième partie) (Lepidoptera Papilionoidea et Zygaenidae Zygaeninae). Alexanor, 24 (8), 2010 : 473-508, 29 illustr. photogr. coul.
Tarrier (Michel R[aymond]), 2014. – Nouvelles sous-espèces de Zygaena beatrix Przegendza, 1932, et de Z. maroccana Rothschild, 1917, dans le Haut Atlas du M’Goun (Maroc) (Lepidoptera Zygaenidae Zygaeninae). Alexanor, 25 (7), 2012 : 437-445, 12 illustr. photogr. coul. de Jean-Marie André.
Tarrier (Michel R[aymond]), 2017. – Le Maroc revisité…, suite et fin (Deuxième partie) (Lepidoptera Papilionoidea et Zygaenidae Zygaeninae). Alexanor 27 (8) : 533-555, 40 illustr. photogr. coul.
Tarrier (Michel R[aymond]), 2017 – Le Maroc revisité, suite et fin (Deuxième partie) (suite) (Lepidoptera Papilionoidea et Zygaenidae Zygaeninae). Alexanor 28 (1) : 71-93 (40 illustr. photogr. coul.).
Tarrier (Michel R[aymond]), 2017 – Formes extrêmes de quelques Zygènes du Maroc et description d’une nouvelle sous-espèce de Zygaena favonia Freyer, 1844 (Heterocera Zygaenidae Zygaeninae). Aquarelles de Xueijing HU ; Photographies de Jean-Marie ANDRÉ. Alexanor, 28 (2) : 167-176 (19 illustr. photogr. coul.).
Tarrier (Michel R[aymond]) et André (Jean-Marie), 2015 – Cinq nouvelles sous-espèces de Zygènes en limites géonémiques méridionales (Anti-Atlas marocain) (Lepidoptera Zygaenidae Zygaeninae). Alexanor, 26 (7), 2014 : 387-398, 23 illustr. photogr. coul.
Tarrier (Michel R[aymond]) et André (Jean-Marie), 2016 – Le Maroc revisité…, suite et fin (Première partie) (Lepidoptera Papilionoidea et Zygaenidae Zygaeninae). Alexanor 27 (6) : 359-376 (28 illustr. photogr. coul.).
Tarrier (Michel R[aymond]), Demange (Jacques) et Delacre (Jean), 2007 – Deux nouvelles sous-espèces de Zygaena aurata Blachier, 1905 (Lepidoptera, Zygaenidae). Bulletin de la Société entomologique de France, 112 (3) : 407-412, 9 illustr. photogr. coul.
Tarrier (Michel R[aymond]) et Hofmann (Axel), 2002 – Cartographie des Hétérocères Zygaeninae du Maroc. Linneana belgica 18 (6) : 301-318, (7) : 321-334, 5 pl. coul., 19 cartes de répartition.
Apartado postal 149, E-29780 Nerja, Espagne.
Courriel : < micheltarrier@gmail.com >.
Site internet : Les Papillons, mémoire vive du Maroc
.
J’ai dû me montrer trop pressée, j’ai un accès libre aux Zygènes du Maroc. Houla quelles photos !!! un enchantement.!!! Merci.
Nous avons reçu ce commentaire de J.-C. W. : « Merveilleux!
Comme pour Michel Tarrier, F. Dujardin fût mon mentor pour l’étude des Zygènes et ensuite j’ai eu la chance de bien connaître Guy Barragué et de voyager avec lui, en particulier au Maroc.
Toutes mes félicitations à M. Tarrier pour les découvertes sensationnelles qu’il a faites au Maroc. On peut citer les redécouvertes de Z. lavandulae, Z. orana tatla et surtout Z. nevadensis atlantica, espèce bien mystérieuse qui avait été décrite sur un demi-exemplaire.
Ses recherches ont permis aussi d’étendre considérablement les aires de répartition de zygènes marocaines comme Z. orana, Z. felix, Z. maroccana, Z. beatrix…
Ces efforts auraient mérité d’être récompensés par la découverte d’une nouvelle espèce. Ce sera peut-être pour plus tard?
Le Doc »
Merci Jean-Claude pour ces lignes qui m’ont touché, concernant notamment notre souvenir commun de Francis Dujardin, un peu oublié par l’entomologie orthodoxe.
De la part de Christian, posté sur le site actias.de:
Wow!
I traveld many times to Morocco. I know how hard it is to get those pictures in such a perfect quality!!
Chapeau!
Christian
De la part de Connor et Dennis (site actias.de):
They are one of the best photos I’ve seen in a long time. Good job!
Connor
The photos are really outstanding! It must have taken ages to get those. I’m a little bit jealous indeed I must admit. It’s a pity I don’t speak French good enough to read the text.
Greetings Dennis
I can imagine Dennis, something I’m sure we can all dream of, being able to take photos of that good quality in an environment that they are naturally from.
Enfin le complément indispensable au livre « Les papillons de jour du Maroc » du même auteur et qui mériterait tout autant une édition papier.
Bravo pour les photos de bêtes souvent d’une fraîcheur remarquable, et pour les excellentes cartes de répartition par sous-espèces.
Dommage que ces merveilles disparaissent peu à peu, malgré les efforts de Michel Tarrier pour protéger leurs localités, notamment du surpâturage.
Christian Dollé